Saltarello

Entre 1358 et 1393, les vies de quelques personnages, parfois fort célèbres, se croisent et s’entrecroisent autour de quelques savoirs mystérieux dans le Paris  truculent et agité du XIVe siècle. Après un prologue où deux des acteurs principaux assistent à l’enterrement d’un troisième, le roman de Matthieu Dhennin s’organise en trois périodes, plumbum qui campe un certain nombre de personnages  quelque 30 ans avant le prologue, tous tournant autour du Duc de Berry, du Roi Charles V et de la vie intellectuelle et donc religieuse du temps. Hydrargyrum, contemporain du prologue, voit se nouer un drame et commencer à se répandre d’étranges bruits autour de l’intérêt de certaines personalités pour des livres douteux, l’alchimie, les juifs et même de satanisme : fantasmes ou réalités qui peut le dire. Aurum enfin, 15 ans plus tard, nous montre les mêmes acteurs, vieillis, changés mais nourrissant toujours les même passions, passions qui pourraient les conduire à leur perte…
J’ai un peu de mal à parler de ce roman, qui m’a beaucoup plu, car exceptionnellement, ce que j’en savais avant de le lire a perturbé ma lecture. J’attendais peu ou prou une enquête sur la mort d’un évêque et en fait ce fil ténu est à peine esquissé. Il existe c’est entendu mais à peine et c’est loin d’être l’essentiel du roman. J’attendais donc des évenements qui ne se produisaient pas et je me sentais perdue alors que j’aurais dû me laisser porter par l’écriture, très belle, sans me soucier d’autre chose.
Car ce qui est au centre de ce roman, plus qu’une énigme de type “policier”, ce sont les livres, les savoirs et cet étonnant creuset d’idées nouvelles, révolutionnaires, dangereuses, manipulées, déformées qu’était le Paris de la guerre de cent ans. On y croise Nicolas Flamel le célebrissime, plus pour sa légende d’alchimiste que pour sa condition d’écrivain-juré, le duc de Berry, qui n’a vu au moins une fois les sublimes enluminures de ces très riches heures qu’il avait commandé et ne vit jamais, Nicole Oresme, un des premiers théoricien de la musique entre autres choses, Taillevent, qui rédigea le premier recueil de recettes français, Christine de Pizan, femme de lettre et ardente avocate des droits des femmes, des rois, des princes d’églises, un truculent boucher bien représentatif de ces bourgeois parisiens qui donnèrent parfois bien du fil à retordre à l’ordre royal, tant d’autres encore.
Rien n’est simple, ni gratuit dans cette “petite” ville ou s’échangent vrais nouvelles, fausses informations, peurs de l’anglais comme du diable, calomnies et fantasmes purs et simples. On s’attarderait à plaisir dans le lieu si vivant, avec ses personnages fascinants sinon attachants, souvent drôles parfois inquiétants, quand soudain le dénouement surprend par sa brutalité soudaine… C’était donc là que l’auteur voulait nous emmener, vers la légende. Véritablement étonnant, j’aime !

Saltarello – Matthieu Dhennin – 2009 – Acte sud

L’avis de Caro(line) que je remercie 18 fois pour son prêt, c’était une lecture commune avec Pimpi, dont j’ai hâte de connaitre l’avis… Le blog de l’auteur autour de son livre

Pour finir, pour le plaisir et parce que Aion (de eïs aïona, pour toujours, éternellement comme me l’a appris mon cousin Lou) est un de mes albums préférés de tous les temps (je vous en ai fait écouter un morceau ici), le Saltarello de Dead Can Dance (le Saltarello est une danse médiéval d’origine Italienne à trois temps me dit-on (je suis nul pour compter les temps) fort entrainante et qui revient telle une antienne dans ce beau roman)

Ce contenu a été publié dans roman français. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

30 réponses à Saltarello

  1. Celsmoon dit :

    Je le lirais bien !

  2. Le Papou dit :

    Pour une musique à 3 temps il faut savoir compter jusqu’à 3.
    On part le bras plié vers le haut, la main a hauteur de l’épaule, on descend 1er temps, bras à gauche 2ème temps, retour à l’épaule 3ème tamps et on se laisse porter par la musique.

  3. M.Nono dit :

    C’est drôle, j’ai pensé à Dead Can Dance quand j’ai vu le titre.
    Moi aussi, je le lirais bien…

  4. Joelle dit :

    C’est un livre qui ne m’aurait pas attirée de prime abord … surtout par son titre je pense. Mais ton billet est alléchant 🙂

  5. lou dit :

     
    Vous avez remarqué les progrès considérables de Yueyin depuis qu’elle lit les pages de Lou ? En ce moment, rien que pour pour vous, total accès à Libellus, gratuit et (presque) indolore.

    Après cette pause, revenons-en à l’actualité.
    _ le cacarente…
    _ … on se fout du cacarente comme de l’an quarante ! Parlez-nous de Saltarello !
    _ je ne l’ai pas lu et le prompteur est en panne, mais on aime les polars historiques et celui-là a l’air très bon, et puis Actes Sud ne publie pas n’importe quoi, en général / j’aurai peut-être le temps de le lire avant le poème, toujours surprise, du dimanche 🙂
     

    • yueyin dit :

      incroyable mes progrès, pas vrai ???
      Celui-là est très bon mais ce n’est pas vraiment un polar, c’est un roman voilà mais historique et même médiéval 😉

  6. freude dit :

    Un titre envoûteur et ton billet donne envie, je note ! Moi aussi je suis nulle en compatge de temps…

  7. Comme je viens de dire chez Pimpi, je vais attendre sa sortie au Québec et me jetter dessus pour essayer de m’en faire une opinion 🙂

  8. Bénédicte dit :

    c’est une période de l’histoire que j’aime bien je le note

  9. Pimpi dit :

    Mon billet montre bien que j’ai été un tantinet moins enthousiaste que toi… mais tu en parles bien mieux que moi, en tout cas!! 😀 On sent bien que tu as aimé!!!

  10. kalistina dit :

    Je n’ai lu ton billet qu’en diagonale puisque Caro me l’a offert et que je ne veux pas déflorer ma découverte, mais il me semble avoir saisi que ça t’a bien plu, ça me donne d’autant plus envie de m’y mettre!

    • yueyin dit :

      J’essaie de ne pas en dire trop en général, mais en tous cas, ne t’attends pas à une enquête classique surtout, sinon tu risques d’être perdue comme Pimpi et moi :-))) et voui j’ai beaucoup aimé 😉

  11. Turquoise dit :

    Ça a l’air bien ! Surtout s’il ne s’agit pas d’un polar déguisé en roman historique…Allez, hop, sur la LAL !

  12. Caro[line] dit :

    Bon, je débarque vachement à la bourre… mais j’ai une excuse, m’dame : le jour de la publication de ton billet, impossible de laisser un comm depuis mon boulot. (Et d’ailleurs, là, ce n’est pas gagné… on verra !!) Et donc je voulais juste te dire que j’étais ravie que ce roman t’ait plu. C’est tout. 😀 (Oui, tout ça pour ça !!! ;-))

  13. Nanne dit :

    Alors, celui-là, je le note, le surnote et le surligne pour ne pas oublier son titre, car ce que tu en dis dans ton billet me parle et plutôt bien, Yueyin ! Je serais comme Ys, à craquer déjà pour la beauté de la couverture du roman, mais chez Actes Sud, ce n’est pas une nouveauté, mais surtout pour le thème et la période. C’est vrai que le XIVe Siècle est peu présent dans les romans … Vile tentatrice, mais tu le vaux bien ;-D

  14. Ys dit :

    J’ai ça dans ma PAL et une énorme envie de le lire. J’ai craqué sur la couv’ puis quand j’ai vu que ça se passait au XIVe siècle ça a aussi retenu mon attention car ce n’est pas une période souvent traitée dans les romans (sauf le prochain Sonatine qui a l’air super !).

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *