Mot pour mot

Louis est professeur de français dans un collège. Désabusé, il ne croit plus en rien et surtout pas en ses élèves où en leur capacité d’apprendre à s’exprimer en français. Noémie, compagne d’un correcteur professionnel, est passionnée par l’essort nouveau de l’écrit et la liberté graphique et lexicale qui l’accompagne. Ils se rencontrent dans un train, comme Noémie est sourde leur dialogue se noue par écrit et tout naturellement l’orthographe devient le thème central de leur débat. Débat qui se poursuit de voyage en voyage, tel un conte des mille et une nuit moderne, ou plutôt des douze trajets… les temps changent !

Je reconnais que je suis sensibilisée par le sujet. Le fait que je me retrouve régulièrement devant des adultes avec pour mission de les aider à améliorer leurs écrits et leur orthographe doit y être pour quelque chose. Dans l’obligation de trouver un biais pour accrocher l’attention de personnes réfractaires par principe, j’ai potassé le sujet et franchement ce livre va au fond des choses. Avec beaucoup d’honnêteté je trouve, il présente les deux points de vue sans les caricaturer. Tout y passe, l’influence du net, de l’écran, le machisme, la scolocratie, la démocratie, l’incohérence, l’intolérance, la mythographie, la permissivité, la phonétique et que sais-je ?

Chacun présente ses arguments jusqu’au bout. Il n’y a ni vainqueur ni vaincu, simplement les choses sont clairement mises en perspective. La lecture et l’écriture sont elles en train de s’écrouler, les jeunes ont-ils perdu tout goût pour la langue et sa forme écrite, les changements sont-ils souhaitables, des réformes possibles, le langage texto tue-t-il réellement l’écrit, quel est le rôle de l’orthographe et de son enseignement dans tout cela, d’où vienne ses incohérences, sont-elles irréductibles ou nécessaires, quelle langue pour demain ou pour reprendre le sous-titre kel ortograf pr 2m1 ?

Si toutes ces questions vous intéressent, ce livre est pour vous.

En plus j’ai appris plein de nouvelles choses pour mes stages, bon je savais déjà d’où venait un certain nombre de bizarreries comme les h étonnants de huile ou de huit, ajouté à la fin du moyen age pour distinguer plus facilement ces mot se ville et vit ( le u alors n’existait pas). Mais j’ignorais d’où venaient nos jolis pluriels en ux. Toujours au moyen âge donc  certains scribes, pour économiser papier et velin, prirent l’habitudes d’abbréger les terminaisons en us en les remplaçant par un x. Et oui par économie que les accros du texto se le disent. Du coup les chous se changèrent en chox, plus tard on redonna au chox son u pour en retrouver la prononciation mais il garda son x. Même chose pour cheval, qui s’écrivit chevals, puis chevax (toujours l’économie) et a qui on laissa bêtement un x  en lui rendant son [o]. J’adore ce genre d’histoire… J’aime bien comprendre comme disait quelqu’un.

Un livre passionnant qui se dévore comme un rien… Merci Lamousmée de me l’avoir fait connaitre. Vous pouvez aussi visiter le blog de Vincent Cepedes où le débat se poursuit avec passion dans les commentaires.

Mot pour mot – Vincent Cespedes – Flammarion – 2007

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25 réponses à Mot pour mot

  1. InColdBlog dit :

    Tout simplement passionnant. Merci à toi de me faire découvrir ce bouquin à côté duquel je serais probablement passé.

  2. oh yue yin tu ne peux pas savoir à quel point cela me touche que tu aimes ce livre !!!!!  je suis ravie ravie ravie d’avoir un peu oeuvré pour cette rencontre qui j’espère fera des petits!!! :o)))

    • yueyin dit :

      Séduite par ta présentation, je l’avais acheté dans l’idée de m’en servir pour le travail mais en fait du moment où je l’ai ouvert, je n’ai pratiquement pas pu le lacher… encore merci Lamousmée !

  3. Gaëlle dit :

    Passionnant ton article ! Lamousmé avait déjà attiré mon attention sur ce livre, mais là c’est sûr je vais me le procurer. 1) toutes ces questions m’intéressent au plus haut point  2) j’adore toutes ces petites histoires qui racontent comment se sont constituées les petites bizarreries de notre orthographe, c’est toujours pittoresque.
    Bref : MERCI à toutes les deux !

  4. Gambadou dit :

    Ce livre à l’air vraiment très intéressant. Je le note. Merci .

  5. Florinette dit :

    Oh oui, oui, oui, ça m’intéresse, merci pour l’info ! 😉

  6. Gachucha dit :

    Tu donnes envie de le lire en tout cas. A priori j’aurai eu peur de quelque chose de trop didactique, ça ne semble pas être le cas.

    • yueyin dit :

      En fait il se lit quasiment tout seul, quand tu relève le nez hop c’est fini 😀 – ça se lit tellement vite même (pour un livre qui n’est pas si court) que j’ai eu un peu de mal à retrouver les passages qui m’interessaient particulièrement pour la chronique ou pour mon entourage (un (vrai) sonnet de verlaine écrit en langage "texto" pour mon ado)

  7. InColdBlog dit :

    Pour continuer un peu sur cette lancée, il y a dans l’Express d’aujourd’hui un long entretien avec Jacqueline de Romilly sur la langue française et son emploi…

  8. Je dois dire Yue yin que ton billet donne vraiment envie de le lire et c’est ce que je trouve très fort car effectivement il pourrait faire peur au départ alors que l’ecriture de Cespedes est tellement forte qu’elle coule et se lit toute seule!! J’ai aussi vu ton petit mot sur son blog ;o) c’est vrai que le débat est passionant!!! A suivre donc le prochain nouvel obs (5 avril) la rencontre Cespedes /Bentolila qui devrait elle aussi être riche!!!

    • yueyin dit :

      Je voulais vraiment souligner le plaisir que j’ai pris à le lire, alors qu’effectivement le sujet pourrait paraitre un peu aride, le traitement en fait tout autre chose… je note pour le nouvel obs 🙂

  9. pepe dit :

    La révolusyon de l’ortograf è déja komansé é èl se propaj rapidman! -> http://www.ortograf.net

  10. Marc dit :

    Oui très bon livre, ce que j’ai lu de mieux depuis longtemps écrit par un contemporain. Bon, quelle orthographe adopter après ça ? Difficle de se prononcer mais au moins, si on n’en devient pas plus tolérant c’est qu’on est vraiment un-e indécrotable conservateur-trice !

    Proposition : Plutôt qu’écrire phonétiquement, ce qui complique la lecture, déjà en écrivant tous les pluriels en s, les féminins terminés par le son i en ie et en supprimant les doubles consonnes, on simplifierait beaucoup.

    Dans le livre, belle démonstration sur le fait que beaucoup de règles tentent de suivre le sens mais qu’en fait cela est inutile car redondant par rapport au contexte qui indique déjà ce sens.

    • yueyin dit :

      Je crois que tu as prononcé le mot clé tolérance… En tout cas il permet peut être de se réconcilier un peu avec notre langue écrite et de redonenr à l’orthographe sa vraie place une aide à la lecture et non une loi immanente contraignante sans discussion possible…  J’ai relu cet ouvrage il ya peu pour me remettre en tête les différentes pistes de réflexions et je m’en sers professionnellement … c ‘est vraiment une mine !!!

  11. Loupiote dit :

    Toutes, ces questiosn m’interressent, ce livre est pour moi.

  12. Flo dit :

    Convaincue ! Quand tu l’as acheté l’autre jour, j’étais sceptique, je pensais que c’était vraiment un livre de travail mais en fait ta présentation le rend nettement plus engageant 😉 Je vais voir s’ils l’ont à Cabanis (dit-elle alors que sa carte de bib est pleine, qu’elle n’a quasiment rien lu depuis samedi, que des bouquins de 600 pages et quelques l’attendent, etc).

  13. Turquoise dit :

    Ben, moi je ne suis pas concernée, mais j’ai lu ta critique tard hier soir… et je suis allée acheter le livre aujourd’hui ! J’ai à peine eu le temps de le commencer, mais je le trouve déjà épatant ! Merci Yue Yin !

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