Pour moi qui suis tombée dans la lecture quand j’étais toute petite, au point que les effets ont été permanents depuis, découvrir Walter Scott, comme plus tard Alexandre Dumas, a été une révélation. Des pages et des pages et encore des pages (soyons fous) d’aventures, de rebondissements, de beaux sentiments, de nobles héros, de belles héroïnes, de bravoures diverses, de ceci et de cela, bref des heures de plaisirs qui n’avaient de limite que les possibilités des bibliothèques familiales et municipales. Ceci pour dire que Ivanhoé a bel et bien été un des héros de mon enfance, d’autant que la télé nous offrait complaisamment et régulièrement le chef d’oeuvre de Richard Thorpe avec l’indéboulonnable Robert Taylor (grand habitué du genre) sans le rôle titre, sans parler de l’innénarable série avec Roger Moore. A l’époque, comme aujourd’hui, la télévision savait rentabiliser ses achats.
Mais revenons à Walter Scott et à son Wilfrid d’Ivanhoé, ce chevalier d’origine saxonne, renié par son père mais fidèle à son roi légitime Richard Coeur de Lion (un normand donc, suivez un peu) a suivi ce dernier lors de la troisième croisade. A son retour, il cherche à rassembler la rançon de son seigneur, prisonnier quelquepart en europe, dans une Angleterre qu’un vil usurpateur, le prince Jean, tente de s’accaparer. Pour ce faire il s’abouche avec Isaac d’York, riche juif, dont la fille, la belle et brune Rebecca, est plus que sensible a son charme saxon et lui servira d’infirmière à l’occasion. Mais le coeur de d’Ivanhoé reste fidèle à la blonde Rowenna qu’il épouse à la fin. Je reconnais que c’est un résumé un peu court, j’ai passé quelques complots, batailles et tromperies sans parler de l’intervention du célébrissime Robin et de ses “gais compagons” mais enfin pour ce qui nous occupe cela suffira.
Cette fin pouvait plaire ou non, certains regrettaient quand même que la belle, la courageuse, l’altruiste, la brune enfin, Rebecca ait été écartée aussi facilement de la vie de Wilfrid au profit de la froide Rowena. William Makepeace Thackeray fut ce ceux-là et décida donc de donner une suite plus à son goût à ce roman chevaleresque et néanmoins injuste. ce fut donc Rebecca and Rowena qui nous conte ce qu’il advint ensuite et comment, après l’échec patenté de son bigot mariage, Ivanhoé repartit guerroyer au côtés de son roi, trucida mélancoliquement à tout va, passa pour mort et, enfin veuf, retrouva celle que, celle qui…
je cède à la tentation de vous copier ici quelques lignes du dernier chapitre :
Mais assez de palabre! Voici la scène finale : Valence est assaillie et prise par les chrétiens.
Qui est le premier sur les remparts pour arracher l’étendard vert du prophète ? qui décapite l’émir Abu Je-ne-sais-plus-comment juste après que ce dernier eut fait subir le même sort au cruel Don Beltran de Cuchilla y etc. ? Qui, attiré dans le quartier juif par les cris déchirants de ses habitants (…) découvre Isaac d’York égorgé sur le seuil de sa maison serrant dans sa main la grosse clé de l’arrière cuisine ? Qui, sinon Ivanhoé ? Hein ? Qui, sinon Ivanhoé ?
– Un Ivanhoé, un ! s’exclame-t-il.
(…) Et qui sort de l’arrière cuisine, toute chancelante, les bras tendus, vêtue d’une simple robe blanche, les cheveux dénoués… ? Qui, sinon Rebecca ? Regardez ! Ils se précipitent l’un vers l’autre, et maître Wamba déploie une bannière devant eux et assomme un curieux avec un jambon qu’il avait sur lui par le plus grand des hasards… Quant à Rebecca, maintenant qu’elle a posé sa tête sur l’épaule d’Ivanhoé, je ne me permettrai pas d’écouter les paroles qu’elle murmure ou d’aller plus avant dans la description de cette scène de retrouvailles, bien qu’elle soit loin de me laisser insensible. En effet je n’ai jamais cessé d’y penser depuis vingt-cinq ans, depuis l’époque où je fréquentais encore les bancs de l’école et me consacrais à la noble étude des romans, depuis ce jour où, je vis apparaitre les silhouettes des braves chevaliers et des belles dames, tombai amoureux de rebecca la plus douce créature dont un poète puisse rêver, et me jurai de lui rendre justice.
Où comment passer du cocasse à l’émotion en deux paragraphes car il est bien facile de se reconnaitre dans cet écolier plongé dans la noble étude des romans. Mais au delà de la justice rendue à Rebecca et de la pochade burlesque, il y a dans ce petit livre une vraie satire qui moque avec jubilation les outrances du romantisme médiévalesque exacerbé, le manichéisme forcené opposant fiers et bons saxons aux fourbes et vils normands, l’idéalisation à la fois du moyen âge, de ses preux chevaliers et de Richard Coeur de Lion (a-t-on idée du choc que ressent une enfant, ou même une adolescente, quand elle découvre que ce fameux prince Jean, vil corrupteur, usurpateur, menteur et autres mots en -eur que l’on se représente volontiers en lion pelé sans crinière suçant son pouce, sera finalement le successeur légitime du beau Richard sur le trône d’Angleterre… Et alors et Robin, et Wilfrid ? Que devinrent-ils ? Et que dire des relations un peu troubles entre frères, mère et père au sein de cette douce famille d’Angleterre ? Quand Dumas faisait des enfants illégitimes à l’histoire, s’il leur donnait autant de souffle, du moins les faisait-il plus subtils mais passons et revenons à nos moutons saxons) En plus de tout cela, il me semble déceler quelquechose de plus corrosif quoique tout en légèreté qui a trait à la distance entre les beaux discours et les actes, entre la vertu affichée et la cruauté des intentions, entre la légende et la boucherie qui l’a précède.
Quoiqu’il en soit un petit bijou de drôlerie à recommander absolument et qui donne terriblement envie de relire l’original de Sir Walter Scott, l’enchanteur de mon enfance.
Mais revenons à Walter Scott et à son Wilfrid d’Ivanhoé, ce chevalier d’origine saxonne, renié par son père mais fidèle à son roi légitime Richard Coeur de Lion (un normand donc, suivez un peu) a suivi ce dernier lors de la troisième croisade. A son retour, il cherche à rassembler la rançon de son seigneur, prisonnier quelquepart en europe, dans une Angleterre qu’un vil usurpateur, le prince Jean, tente de s’accaparer. Pour ce faire il s’abouche avec Isaac d’York, riche juif, dont la fille, la belle et brune Rebecca, est plus que sensible a son charme saxon et lui servira d’infirmière à l’occasion. Mais le coeur de d’Ivanhoé reste fidèle à la blonde Rowenna qu’il épouse à la fin. Je reconnais que c’est un résumé un peu court, j’ai passé quelques complots, batailles et tromperies sans parler de l’intervention du célébrissime Robin et de ses “gais compagons” mais enfin pour ce qui nous occupe cela suffira.
Cette fin pouvait plaire ou non, certains regrettaient quand même que la belle, la courageuse, l’altruiste, la brune enfin, Rebecca ait été écartée aussi facilement de la vie de Wilfrid au profit de la froide Rowena. William Makepeace Thackeray fut ce ceux-là et décida donc de donner une suite plus à son goût à ce roman chevaleresque et néanmoins injuste. ce fut donc Rebecca and Rowena qui nous conte ce qu’il advint ensuite et comment, après l’échec patenté de son bigot mariage, Ivanhoé repartit guerroyer au côtés de son roi, trucida mélancoliquement à tout va, passa pour mort et, enfin veuf, retrouva celle que, celle qui…
je cède à la tentation de vous copier ici quelques lignes du dernier chapitre :
Mais assez de palabre! Voici la scène finale : Valence est assaillie et prise par les chrétiens.
Qui est le premier sur les remparts pour arracher l’étendard vert du prophète ? qui décapite l’émir Abu Je-ne-sais-plus-comment juste après que ce dernier eut fait subir le même sort au cruel Don Beltran de Cuchilla y etc. ? Qui, attiré dans le quartier juif par les cris déchirants de ses habitants (…) découvre Isaac d’York égorgé sur le seuil de sa maison serrant dans sa main la grosse clé de l’arrière cuisine ? Qui, sinon Ivanhoé ? Hein ? Qui, sinon Ivanhoé ?
– Un Ivanhoé, un ! s’exclame-t-il.
(…) Et qui sort de l’arrière cuisine, toute chancelante, les bras tendus, vêtue d’une simple robe blanche, les cheveux dénoués… ? Qui, sinon Rebecca ? Regardez ! Ils se précipitent l’un vers l’autre, et maître Wamba déploie une bannière devant eux et assomme un curieux avec un jambon qu’il avait sur lui par le plus grand des hasards… Quant à Rebecca, maintenant qu’elle a posé sa tête sur l’épaule d’Ivanhoé, je ne me permettrai pas d’écouter les paroles qu’elle murmure ou d’aller plus avant dans la description de cette scène de retrouvailles, bien qu’elle soit loin de me laisser insensible. En effet je n’ai jamais cessé d’y penser depuis vingt-cinq ans, depuis l’époque où je fréquentais encore les bancs de l’école et me consacrais à la noble étude des romans, depuis ce jour où, je vis apparaitre les silhouettes des braves chevaliers et des belles dames, tombai amoureux de rebecca la plus douce créature dont un poète puisse rêver, et me jurai de lui rendre justice.
Où comment passer du cocasse à l’émotion en deux paragraphes car il est bien facile de se reconnaitre dans cet écolier plongé dans la noble étude des romans. Mais au delà de la justice rendue à Rebecca et de la pochade burlesque, il y a dans ce petit livre une vraie satire qui moque avec jubilation les outrances du romantisme médiévalesque exacerbé, le manichéisme forcené opposant fiers et bons saxons aux fourbes et vils normands, l’idéalisation à la fois du moyen âge, de ses preux chevaliers et de Richard Coeur de Lion (a-t-on idée du choc que ressent une enfant, ou même une adolescente, quand elle découvre que ce fameux prince Jean, vil corrupteur, usurpateur, menteur et autres mots en -eur que l’on se représente volontiers en lion pelé sans crinière suçant son pouce, sera finalement le successeur légitime du beau Richard sur le trône d’Angleterre… Et alors et Robin, et Wilfrid ? Que devinrent-ils ? Et que dire des relations un peu troubles entre frères, mère et père au sein de cette douce famille d’Angleterre ? Quand Dumas faisait des enfants illégitimes à l’histoire, s’il leur donnait autant de souffle, du moins les faisait-il plus subtils mais passons et revenons à nos moutons saxons) En plus de tout cela, il me semble déceler quelquechose de plus corrosif quoique tout en légèreté qui a trait à la distance entre les beaux discours et les actes, entre la vertu affichée et la cruauté des intentions, entre la légende et la boucherie qui l’a précède.
Quoiqu’il en soit un petit bijou de drôlerie à recommander absolument et qui donne terriblement envie de relire l’original de Sir Walter Scott, l’enchanteur de mon enfance.
Ivanhoé à la rescousse (Rebecca et Rowena) – William Makepeace Thackeray – 1851 – (Rivages 2009)
Les avis de Chiffonnette, Lilly, Fashion…
Challenge English Classic 4/2
PS Cela me fait plaisir de savoir que Thackeray aussi pouvait tomber amoureux de personnages de fiction, je me sens moins seule… PPS pour le plaisir
PPPS et pour rire
Je lis en diagonale, car ce titre est déjà dans ma PAL !
aucun suspens tu sais, tout est annoncé d’avance :-)))))
Ahhhhh, enfin!! J’étais certaine que tu allais adorer ce texte!! C’est tellement, tellement drôle!! Thackeray a un don pour la satire et en même temps un tel amour des personnages qu’il ne peut nous être que sympathique!
Ouiiii sorry, je l’avais lu il y a un bail mais je n’avais toujours pas écrit mon bilelt shame on me… ça m’a beaucoup plu évidemment :-)))
Me croiras-tu si je te dis que je n’ai JAMAIS lu Ivanhoé???? Me pardonneras-tu surtout?? Tu me donnes tellement envie de lire le roman d’origine, puis cette suite!!! 😀 Va falloir remédier à ça… surtout que je suis à fond dans les romans historiques en ce moment!
Arghhh je te crois à peine et je te l’envoi j’en avais justement un exemplaire tout neuf qui trainait… tss tss
Ca tombe bien, j’ai déjà Ivanhoé dans ma PAL … je note celui-ci pour “compléter” 😉
voilàààà pour compléter :-)))
Bon, je veux lire ce livre… sauf que je sius comme Pimpi, je ne connais pas Ivanhoe! Il va falloir remédier à ça!!!
Ah Ben ça ne va pas, il va falloir que je remédie ;-)))
Un Thackeray que je n’ai pas lu est toujours une excellente nouvelle, c’est comme une surprise du chef qui m’attendrait chez moi un soir pluvieux et battu des vents… merci de ce billet qui me permet de découvrir un roman inconnu de cet auteur dont je raffole. malheureusement si peu traduit en français. Merci merci merci !
C’était mon premier Thackeray mais j’ai la foire aux vanités dans ma pal :-)))
J’avais repéré ce petit livre de Thackeray chez Chiffonnette et je me le suis fait voler à la librairie, sous mon nez par quelqu’un qui a été plus rapide que moi ! Il faut que je le trouve absolument, mais avant, il faudrait peut-être que je relise Ivanhoé … Question de me remettre dans le bain de l’histoire et ne pas paraître ridicule en le lisant ;-D Ce serait une bonne idée !
C’est toujorus une bonne idée de relire ses classiques non ? bon moi j’ai fait l’inverse je viens d’empreinter Ivanhoé à la bibli pour le relire :-))))
Que voilà un bon billet qui rend justice au délicieux pastiche de Thackeray. Moi aussi j’ai adoré ce (trop) court récit où le père Ivanohé s’en plein la figure… Si ça te tente, sache que Thackeray se moque également des contes de fées dans un autre ouvrage, La rose et la bague. J’ai prévu de l’acheter d’ici quelques semaines 🙂
Ah oui ??? merci de l’info, j’avoue qu’un autre pastiche de Thackeray me plairait bien 🙂
Contrairement à toi je ne suis pas follement portée sur Walter Scott mais ça viendra peut-être un jour :o) A mon avis après Thackeray me connaissant :p Merci de m’avoir indiqué ton billet que j’ai rajouté au mien.
Je m’étais régalée avec ce Thackeray, je suppose que je devrais essayer de le lire dans ces oeuvres plus ambitieuses 🙂
Je ne savais pas que Thackeray regrettait aussi l’issue amoureuse de Ivanhoé. J’avais entendu parler des réecritures de Balzac mais là, je suis contente d’imaginer que je vais pouvoir retrouver des héros de mon enfance et que la fin sera plus à mon goût!
Comment toi aussi tu aurais préféré que sir Wilfrid parte avec la brune rebecca… décidément mais à quoi pensait sir walter 🙂 Ce petit opuscule de Thackeray est vraiment très drôle et j’ai relu Ivanhoé l’année dernière, c’est toujours aussi réjouissant !