Veux-tu recommencer la vie ?
Femme, dont le front va pâlir,
Veux-tu l’enfance, encor suivie
D’anges enfants pour l’embellir ?
Veux-tu les baisers de ta mère
Echauffant tes jours au berceau ?
– “Quoi ? mon doux Eden éphémère ?
Oh ! oui, mon Dieu ! c’était si beau !”
Sous la paternelle puissance
Veux-tu reprendre un calme essor ?
Et dans des parfums d’innocence
Laisser épanouir ton sort ?
Veux-tu remonter le bel âge,
L’aile au vent comme un jeune oiseau ?
– “Pourvu qu’il dure davantage,
Oh ! oui, mon Dieu ! c’était si beau !”
Veux-tu rapprendre l’ignorance
Dans un livre à peine entr’ouvert :
Veux-tu ta plus vierge espérance,
Oublieuse aussi de l’hiver :
Tes frais chemins et tes colombes,
Les veux-tu jeunes comme toi ?
– “Si mes chemins n’ont plus de tombes,
Oh ! oui, mon Dieu ! rendez-les moi !”
Reprends-donc de ta destinée,
L’encens, la musique, les fleurs ?
Et reviens, d’année en année,
Au temps qui change tout en pleurs ;
Va retrouver l’amour, le même !
Lampe orageuse, allume-toi !
“- Retourner au monde où l’on aime…
O mon Sauveur ! éteignez-moi !”
Marceline Desbordes-Valmore (1786-1859) – Elégies
J’aime beaucoup cette poétesse et mon poème préféré reste “Les séparés” !
Bon dimanche Yue yin ! 🙂
les séparés dis-tu, je me mets en chasse :-))))
Les jeunes ne savent pas que l’expérience est une défaite et qu’il faut tout perdre pour savoir un peu. Lui avait souffert. Il n’en disait rien. Ca fait mieux de paraître heureux.
Albert Camus, L’envers et l’endroit, L’Ironie (Bibliothèque de la Pléiade, tome I, p. 42)
BONUS
Oui, tout est simple. Ce sont les hommes qui compliquent les choses. Qu’on ne nous raconte pas d’histoires. Qu’on ne nous dise pas du condamné à mort : “Il va payer sa dette à la société”, mais : “On va lui couper le cou.” Ca n’a l’air de rien. Mais ça fait une petite différence. Et puis il y a des gens qui préfèrent regarder leur destin dans les yeux.
Albert Camus, L’envers et l’endroit, Entre oui et non (Bibliothèque de la Pléiade, tome I, p. 54)
[ça n’a aucun rapport, comme tous les bonus]
Mais n’est-ce pas lui aussi qui a dit que le bonheur aussi était inévitable ?
J’aime bien le bonus 😉
Merci beaucoup Yueyin pour la découverte de ce magnifique poème!
Mais avec plaisir Abeille, il me plait beaucoup…
Et il y a un super-bonus sur Libellus, demain, à partir de minuit.
ohoh j’y serais 😉
Quel beau poème !
je ne connais pas du tout cet auteur…
Je le découvre ces jours ci et je me régale 🙂
Magnifique poème ! Le peu que je connais de Marceline Desbordes-Valmore est superbe.
J’aborde juste cette auteure et je me régale 🙂