Elle

haggardShe.jpegVoilà un roman quasi mythique, un de ces romans d’aventures dont la fin du XXe siècle a eu le secret et qui ont fait rêver (et ont peut être influencé) plusieurs générations de lecteurs. Une de ces histoires où des gentlemen anglais aussi érudits que forts découvrent des mondes perdus desquels le temps et la civilisation (du moins la civilisation telle que comprise par des européens de l’époque) sont exclus…
Dans le cas de Elle, cette trame se complique de la présence d’une souveraine immortelle, Ayesha Elle-qui-doit-être-obéie, despote absolue de son peuple, toujours voilée car une simple vision de sa beauté enchaîne les hommes pour toujours, cultivée d’une façon qui peut parler à un héros victorien – elle parle grec, latin, arabe classique, capable de tuer d’un seul regard et pour autant admirablement chaste puisqu’elle attend le retour de son amour depuis plus de 2000 ans, amoureux qu’elle a tué de sa main en son temps.
Tous les fantasmes du colonialisme victorien s’épanouissent joyeusement dans cette folle histoire où se mèle nature sauvage, ruines imposantes, mystère de la vie, peuplade cannibale et tous les ingrédients qui seront un jour ceux du genre… car nous en sommes au début ! Henri Rider Haggard, lorsqu’il écrit She en 1886 a déjà les Mines du roi Salomon a son actif et est en train de donner véritablement ses lettres de noblesses à ce type de roman d’aventures qui connaitra une immense popularité à la fin du XIXe et au début du XXe. Il n’est  peut-être pas cité dans les auteurs victoriens classiques mais il fut l’un des auteurs les plus célèbres et les plus populaires de son temps et son influence n’a pas fini de se faire sentir – Ne dit-on pas que le très célèbre Indiana Jones (fort et érudit lui-même) est directement inspiré de son Allan Quatermain. Quand à Ayesha que Freud et Jung ont tous deux considérée comme un Archétype féminin, ma foi il serait intéressant de spéculer sur ses descendantes directes ou non !
Alors certes c’est un roman ancré dans son siècle et certains des préjugés de l’auteur sont inacceptables de nos jours mais pour son époque justement, je crois qu’il faisait preuve d’assez de largeur d’esprit. Il met en scène un peuple où les femmes sont totalement libres de leur choix – car ce sont elles qui donnent la vie – , un amour sincère entre un gentleman anglais et une africaine en peau de léopard,  une femme devenue toute puissante par la force de son esprit… Pour un homme de son éducation ce n’est pas si mal. Le style est certes assez emphatique pour un pur roman d’aventure mais agréable et même enlevé. Dans l’ensemble une belle découverte que je dois à mon excellente amie, Amelia Peabody Emerson qui ne cesse de recommander cet auteur malgré les moqueries de son séduisant époux. Exotique ! Elle – Henry Rider Haggard – 1886 – traduction (révisée) de Jacques Hillemacher

PS.  La traduction de She a fait beaucoup débat il fut un temps car le roman fut traduit  en français en plein procès de plagiat fait à Pierre Loti et son Atlantide… apparemment des versions plus ou moins abrégées ou mutilée ont fleuri et je ne sais pas trop ce que valait la mienne – bien qu’elle soit révisée “d’après l’original anglais” je cite. N’est-ce pas extraordinaire de préciser cela ?

PPS. She a fait l’objet d’innombrables adaptations cinématographiques dont la première date de 1899 (La danse du feu de Georges Meliès) et la dernière de 2001 (Timothy Bond). Une des plus célèbre est sans doute celle de 1965 – La déesse du feu de Robert Day – avec Ursula Andress dans le rôle titre.

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