La pluie et les tyrans

Je vois tomber la pluie

Dont les flaques font luire

Notre grave planète,

La pluie qui tombe nette

Comme du temps d’Homère

Et du temps de Villon

Sur l’enfant et sa mère

Et le dos des moutons,

La pluie qui se répète

Mais ne peut attendrir

La dureté de tête

Ni le cœur des tyrans

Ni les favoriser

D’un juste étonnement,

Une petite pluie

Qui tombe sur l’Europe

Mettant tous les vivants

Dans la même enveloppe

Malgré l’infanterie

Qui charge ses fusils

Et malgré les journaux

Qui nous font des signaux,

Une petite pluie

Qui mouille les drapeaux.

 

Jules Supervielle – Les fables du monde – 1938

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4 réponses à La pluie et les tyrans

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