Mai 1897, dans le Paris mondain il n’est question que de la grande vente du Bazar de la Charité, l’événement de la saison. Pour chaque femme ou fille bien née, se montrer derrière un de ces comptoirs pour jouer à la marchande en faisant son devoir de bonne chrétienne, est une nécessité qui justifie manigances et subterfuges en tout genre. Au mépris de la bienséance bourgeoise, la duchesse d’Alençon – soeur cadette de la célébrissime impératrice d’Autriche – a accordé ce précieux privilège à deux jeunes femmes à la réputation chancelante, l’une pour son passé opaque, l’autre pour avoir tenu tête à sa famille et rompu ses fiançailles ; ce qui ajoute un rien de piment supplémentaire aux ragots en vogue. Et comme distraction supplémentaire, on annonce une démonstration du tout nouveau cinématographe. Hélas c’est de là que viendra l’étincelle qui ravagera le tout Paris féminin en quelques minutes d’enfer et de flammes. Pour les rescapées, le monde en sera changé à jamais et l’épreuve ne fait peut-être que commencer…
J’ai une tendresse tout à fait spéciale pour ce roman et ses personnages dont j’ai attendu avec l’impatience d’un lecteur de feuilleton du XIXe, la suite des aventures de semaine en semaine. Plusieurs année ont passé et pourtant Sophie, Violaine et Constance sont restées bien vivantes dans ma mémoire. Autant vous dire que j’ai sabré* le champagne quand j’ai su qu’enfin, enfin, ce superbe roman allait être publié et que tout un chacun pourrait s’en régaler. Gaëlle Nohant sait insuffler vie et chaleur à ses personnages, ses cadres et ses atmosphères. Avec elle nous plongeons dans le Paris tout en contrastes de la Belle Époque, elle nous fait vivre la condition de ces femmes de la bonne société, si privilégiées par certains aspects et si étroitement corsetées par les règles implicites d’un milieu qui réprime et châtie sans pitié le moindre écart, fut-il involontaire. On grince des dents devant ces psychiatres si pleins de bons sentiments, si profondément pervers, on plaint ces bibelots de prix peut-être mesquines mais qui se croyaient aimées et n’étaient qu’admirées, on suit avec fascination la mécanique implacable des médias toujours en mal de sensations. Autour de ces thèmes – et de bien d’autres encore, l’auteure tresse les destinées de ses personnages en une intrigue passionnante, rondement menée voire haletante à la toute fin, dans une écriture élégante et subtile mais vigoureuse aussi et étonnamment sensuelle. Admirable !
La part des Flamme – Gaëlle Nohant – 2015 – Héloïse d’Ormesson
* métaphoriquement s’entend, je préfère ouvrir les bouteille de manière conventionnelle, je sais c’est un tantinet mesquin mais que voulez-vous, gâcher du champagne, c’est mal.
PS : Gaëlle Nohant est également l’auteur de L’Ancre de rêves, un petit bijou de roman que vous devriez déjà avoir lu, mais si ce n’est le cas, réjouissez-vous, il est sorti en poche chez Pocket…
PPS : Son recueil de nouvelles L’homme dérouté n’est pas mal non plus, voire fort bon et même excellent…
PPPS : Bien que La part des flammes soit un authentique roman, tous les détails relatifs à l’incendie du Bazar de l’Hôtel de Ville sont authentiques. il existe sur les lieux, rue Jean Goujon, une chapelle dédiée à la mémoire des près de 200 victimes, essentiellement des femmes de l’aristocratie et de la haute bourgeoisie parisienne, que fit cet incendie. L’événement eut, à l’époque, le retentissement qu’aura plus tard la catastrophe du Titanic. Le cinématographe, jugé responsable, faillit ne pas s’en remettre.
PPPPS : Courez vous l’acheter que diable…
Une époque que j’adore ! Un très bon livre pour cet été, il me semble ! C’est noté en tout cas !
Un bon livre en tout temps, je te souhaite une belle lecture 🙂
Quand je pense que tu viens de réussir à me vendre Gaëlle Nohant ! Enfin… je viens de l’acheter.
Elle est charmante, c’est entendu, mais c’est surtout pour la charité. J’adore quand ça crépite, quand ça panique, quand ça meurt dans d’atroces souffrances fuligineuses.
Que diable ! comme tu le dis…
Elle est vraiment charmante tu sais et son livre est excellent (le premier aussi d’ailleurs mais bon 🙂 )
Quel enthousiasme, jadore ! A priori pas ma tasse de thé mais je pourrais succomber devant une telle euphorie 😉
Ah oui j’ai tendance à être très enthousiaste quand j’aime 🙂 et tu as de la chance qu’on ne se soit vu que quelques minutes au salon du livre, je t’aurais peut être trainer jusqu’au stand de Gaelle sinon 🙂
Une amie me l’a prêtée, ton avis et celui d’Isil me faisaient trop envie !
Tu me diras alors, j’espère qu’il te plaira autant qu’à moi 🙂
Noté chez moi aussi. Un livre qui m’intéresse et qui m’intrigue. Très envie de romans historiques en ce moment en plus.
Tu vas te régaler alors 🙂
Je finirai pas succomber, obligé ! 😉
O-bli-gée 🙂 tu ne le regrettera pas promis 🙂
J’ai trouvé ça fade et très caricatural. Quant à l’écriture, elle est lyrique à l’excès, je me suis vite lassée. Ça n’engage que moi .:)
Ma foi aucun roman ne fait l’unanimité – ce serait étrange, comme tu as vu celui-ci a été un coup de coeur pour moi, j’aime beaucoup l’écriture de l’auteure et la façon très réaliste et vivante qu’elle a de peindre un milieu et une époque mais je suis curieuse de savoir ce que tu as trouvé caricatural.