Albertine en cinq temps

À 70 ans, Bartine, désormais seule au monde, emménage dans une maison de retraite et se retrouve – littéralement – face à elle-même. Albertine à 30 ans – pleine de vie et d’une colère qui peine à s’exprimer, Albertine à 40 ans perdue dans sa rage, Albertine à 50 ans plus apaisée, enfin autonome mais sur la défensive, Albertine à 60 ans cassée et droguée, Albertine à  70 ans presque sereine, ou disons prête à faire face à sa vie. Une vie cabossée vécue sous le maitre signe de la frustration qui, dans cette étonnante introspection chorale, nous fait la démonstration d’une inaptitude au bonheur tout en esquissant en filigrane une histoire intime de la condition féminine dans le Québec du tournant du XXe siècle.

Je continue mon voyage dans le théâtre de Michel Tremblay et grand Tolkien que je regrette de n’avoir jamais eu l’occasion de voir au moins une de ses pièces sur scène. Je me demande même parfois si je ne préfère pas ses pièces à ses romans – si du moins une telle préférence pouvait avoir un sens tellement j’aime son écriture, sa finesse, la richesse de son univers et la subtilité qu’il instille dans ses personnages. Albertine, personnage centrale des Chroniques du Plateau Mont-Royal nous ouvre ici les secrets d’un cœur rongé par le rôle qui lui a été assigné et dont elle n’a jamais pu, jamais voulu se satisfaire. Eut-elle été plus heureuse si elle avait vécu un autre destin dans une autre époque ? qui sait. Ayant lu  cet été Le Peintre d’aquarelle – dont je vous parlerai quelque jour – roman qui conte le destin du fils d’Albertine, Marcel, destin hors norme, tragique mais peut-être finalement moins terrible que celui de sa mère ; j’ai été profondément touchée par cette femme si peu en accord avec ce qu’on attendait d’elle, si insoumise dans son apparent conformisme, si seule enfin tout au long de sa vie. Attention Chef d’oeuvre !

Albertine en cinq temps – Michel tremblay – 1984  Léméac – 2007 Actes sud papiers

 

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13 réponses à Albertine en cinq temps

  1. lepapou dit :

    Michel Tremblay s’est du bonbon du Québec de la ‘tire’ quoi !
    Le Papou

  2. Aifelle dit :

    Chef d’oeuvre ? Je note bien sûr. (Faut-il avoir lu les Chroniques pour vraiment l’apprécier ?)

  3. argali dit :

    N’y a-t-il qu’un Michel Tremblay en littérature ? Il me semble que sa production est tellement variée, les sujets tellement diversifiés. J’ai aimé ce que j’ai lu jusqu’ici. Je prends note de ce titre.

  4. athalie dit :

    J’avais très envie de relire du Michel Tremblay mais je retardais parce que ses chroniques du plateau me paraissaient une lecture un peu conséquente, et à force d’attendre le bon moment …. Du coup, je note ce titre, puisque visiblement, on peut découvrir les personnages un peu dans le désordre.

  5. Violette dit :

    quelle belle découverte apparemment! Tu m’intéresses encore plus dans la rubrique théâtre, quelles pièces à privilégier, dis-moi?

    • yueyin dit :

      Houla excellente question, j’ai aimé tout ce que j’ai lu de Tremblay – pièces, mémoires et romans – mais je suis loin de m’y connaitre assez en ce qui concerne son théâtre – vu le mal que j’ai à trouver ses pièces en plus, je n’en ai pas lu tant que ça… Karine serait plus à même de te conseiller. En tout cas j’ai beaucoup aimé celui-ci et la maison suspendue qui partage une certaine originalité dans la manière de traiter la chronologie 🙂

  6. Un personnage qui a l’air attachant.

  7. isallysun dit :

    Je l’avais repéré je ne sais plus où, donc un jour sans doute. Mais comme j’ai peu lu de Tremblay (si, c’est possible…), je vais devoir trouver plusieurs jours!

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