Gus vit et travaille sur sa terre cévenole depuis bientôt cinquante ans – et si la vie ne lui fut pas toujours douce, loin s’en faut, rien a priori, ne devrait plus bousculer ce grand solitaire : traite, veau, labour, récolte, repas en solitaire, une expédition au village en tracteur chaque semaine, un peu de télé le soir, de temps à autre un verre avec son plus proche et unique voisin le vieil Abel. Assez pour remplir une vie ? Possible. Mais un cri dans les ténèbres, une tâche sombre sur la neige, une visite inattendue vont remettre en cause l’équilibre d’une existence qui se mentait peut-être à elle-même.
Lors du dernier festival Toulouse polars du sud, j’ai eu le plaisir d’assister à une table ronde autour de la nature dans le polar à laquelle assistait un de mes auteurs fétiches – Craig Johnson – et Franck Bouysse – donc – que je ne connaissais pas encore. La rencontre dut être intéressante car, en sortant, je filai derechef (et ne fut pas la seule) acheter Grossir le ciel et me le faire dédicacer (oui oui j’avais amené un de mes propres livres pour Craig, je vous rassure). Et je fis bien car c’est un très beau roman ! Noir certes, très noir, bien serré et sans sucre d’aucune sorte. Est-ce pour autant un polar ? Cela pourrait se discuter. Quoiqu’il en soit c’est une de ces histoires si sombres et opaques que ni la nature ni la neige – omniprésente – ne suffisent à y apporter même un soupçon de lumière. Presque trop sombre pour moi en fait avec ses personnages aussi désespérés que peu aimables, reste l’écriture… âpre, rugueuse, évocatrice de tout un monde d’odeurs fortes, de froid coupant, de texture boueuse, d’une certaine misère aussi, plus mentale que physique sans doute mais profonde et si peu susceptible de rédemption. Puissant !
Grossir le ciel – Franck Bouysse – La manufacture de livres – 2014
PS : Un détail m’a surprise quand même, qu’un homme sans beaucoup de religion mais dont il est souligné plusieurs fois qu’il a été élevé dans le culte protestant, essaie de se souvenir du “Je vous salue Marie” mais bon c’est du mini bémol.


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