Après l’expansion, est venue la contraction. La pénurie des combustibles fossiles a rendu les voyages sinon impossibles du moins longs et chers, les pays se sont repliés sur eux-mêmes, nombre d’entre eux se sont écroulés. Les États-Unis – où plutôt les grandes agrocompagnies qui en sont issues, continuent d’exporter sans états d’âmes leurs productions biotechnologiques seules résistantes aux diverses pestes biologiques qui ravagent hommes, animaux et plantes. Les calories sont la seule monnaie qui vaille quand partout la force animale est devenu source de toute énergie, qu’elle soit produite par des espèces génétiquement modifiées ou simplement par l’homme. Dans ce monde déliquescent, le royaume de Thaïlande a su se préserver des corporations américaines et des visées militaires des ses voisins. A l’abri des monstrueuse digues qui la protège de la mer qui monte, Bangkok résiste et survit, régie par un ministère de l’environnement à l’affut de toute importation illégale, minée par des mafias de toute obédience, nid d’espions et d’agioteurs en tout genre cherchant la faille pour un peu de plus de profit. Quand un fruit disparu depuis longtemps refait surface dans les marchés populaires de la ville, Anderson Lake, sous-marin d’une des grandes biotech américaine, flaire une menace pour l’hégémonie de ses employeurs et décide de mener l’enquête. Une enquête qui va nouer les destins de Carlyle le trafiquant, Jaidee l’incorruptible, Hock seng le survivant, Emiko l’androïde de luxe abandonnée un jour aux bas-fond de la ville, tant d’autres encore et peut-être Bangkok elle-même…
Il est bien difficile de rendre hommage à un roman aussi riche et foisonnant que La Fille automate. Après un début plutôt tranquille qui plante, sans entrer dans de fastidieuses explications, un décor à la fois exotique, futuriste, presque apocalyptique mais étonnamment reconnaissable, l’intrigue se noue et l’action s’accélère pour finir en apothéose limite haletante. La diversité des thèmes digérés et intégrés par l’auteur est saisissante, et culmine dans l’affrontement de personnages vivants, complexes – et étonnamment attachants je dois dire malgré leur cruauté. Chacun incarnant une de ces forces qui tentent toujours de dominer toute société, le libéralisme d’Anderson et de Carlyle, l’idéalisme de Jaidee et Kainya, l’opportunisme de Hock seng, la soif de pouvoir de Pracha et Akkara, le cynisme de Gibson… Seule Emiko – fille du nouveau peuple – est différente. Paolo Bacilagupi forge ici un futur possible de notre présent beaucoup trop crédible pour nous laisser dormir en paix, c’est effrayant, fascinant, pleins de trouvailles aussi réjouissantes qu’inquiétantes, puissamment écrit et implacablement mené et c’est un premier roman. Couvert de prix il est vrai. Impressionnant !
La fille automate – Paolo Bacigalupi – 2009 – traduit de l’anglais (américain) par Sarah Doke – Au diable vauvert 2012 – J’ai Lu 2013
Compte pour les items 7, 8, 14, 17, 18 et 20 du défi SFFF et diversité de Lhisbei mais bon, je n’en marque qu’un de plus le 8, car il est questions de femmes dans la guerre (enfin une insurrection à la limite de la guerre civile) et avec un rôle prépondérant…


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