Vous ferais-je l’affront de vous rappeler le sujet de trois des plus célèbres pièces-films du XXe siècle français ? Oui ? Non ? Ne se prononce pas. C’est malin. Alors disons que Marius – pièce en quatre actes et six tableaux – raconte la passion d’un jeune bistrotier pour la mer, passion qui lui fera abandonner famille – son père en l’occurence – et amour – la jeune Fanny – malgré tous les efforts de cette dernière pour le retenir. Fanny – pièce en trois actes et quatre tableaux – raconte la façon dont le personnage éponyme fera face à une situation deshonorante pour l’époque et César – Comédie en deux actes et dix tableaux – apportera un épilogue – vingt ans plus tard – à cette tragi-comédie.
Tragi-comédie car ce qui fait le sel de cette trilogie, au-delà d’une histoire ni très nouvelle ni très originale, c’est le cadre – le célèbrissime Bar de la marine, la verve marseillaise de César et de ses commensaux : Panisse, Escartefigue et monsieur Brun, lyonnais égaré sur le vieux port. Je n’avais jamais lu les pièces, mais – comme la plupart des français – je connaissais bien la trilogie au travers des films, scénarisés et produits par Pagnol lui-même au début des années trente et dont il avait imposé la distribution aujourd’hui légendaire. Je ne me souviens pas d’une partie de belote avec mes parents ou grand-parents sans que quelqu’un ne se soit tenté à un “tu me fends le coeur”, du meilleur aloi à la parlante mais fortement prohibé dans les tournois comme aurait pu le faire remarquer Panisse. Alors pas de surprise avec les pièces – qui d’ailleurs sont très proches des films et pour cause, le dernier film a même précédé la pièce – on y retrouve toute la verve méridionale de Pagnol, sa drôlerie, la légendaire exagération marseillaise, son petit peuple bigarré et fort en gueule autour d’une histoire qui écrite autrement aurait pu donner une tragédie racinienne des plus classique assortie d’une conclusion molièresque (dites-moi un peu pourquoi il n’existe pas d’adjectif formé sur molière, c’est injuste à la fin !)
Emportée par mon élan, j’ai donc revu le premier film de la trilogie, Marius, qui au-delà de la persormance d’acteurs en particulier celles de Raimu et de Pierre Fresnay – je n’aime pas Orane Demazis, je lui trouve le phrasée plaintif bref – vous plonge dans un monde disparu (cela me fait rêver de voir des images d’autrefois – les cuisines par exemples, mais les voiliers aussi, un peu comme si quelqu’un allait planter sa caméra, je ne sais pas moi, dans les cuisines de Vatel ou la salle d’audience de Charlemagne – d’accord j’exagère mais nous parlons de la trilogie marseillaise, j’ai le droit). Cela aide à faire passer une histoire d’hommes où les femmes sont bonnes à se sacrifier pour l’honneur pendant que leur galant courre le guilledou ou les mers, ce qui est quand même le coeur du propos. Savoureux !
La trilogie marseillaise – Marius (1929 – 31 au cinéma), Fanny (1931 – 32 pour le film), César (1946 – 1936 pour le film)
Pour le plaisir, c’est moi qui régale…