Les Mystères de Grantchester

Un mois anglais, c’est l’occasion de faire des découvertes… J’ai par exemple découvert que Grantchester la jolie série anglaise d’ITV avec James Norton était l’adaptation de plusieurs recueils de nouvelles de James Runcie intitulés The Grantchester mysteries dont les deux premiers tomes ont paru en français chez Acte sud noir. Leur coller l’étiquette Policier est peut-être un tantinet exagéré mais enfin il y a toujours une enquête et toujours un policier, en l’espèce le meilleur ami du personnage principal : le peu conventionnel chanoine Sidney Chambers pasteur de la petite paroisse de Grantchester tout près de Cambridge dans les années cinquante.

La série (les deux séries en fait) restituent avec bonheur l’ambiance des fifties anglaises, encore corsetées dans des conventions que la décennies à venir s’apprête à ébranler. Et des hommes comme le pasteur Chambers annoncent ces changements, féru de jazz, extrêmement tolérant – en partie du fait de son éducation, en partie du fait de ses années de guerre, profondément sincère dans son désir de servir sa communauté et d’être lui-même à la hauteur d’une éthique exigeante, Sidney Chambers est aussi un ami fidèle, un amoureux perturbé, un insatiable curieux des autres, distrait parfois et sans doute moins discipliné qu’il ne le souhaiterait. Toute ces caractéristiques l’amènent continuellement à se mêler des enquêtes de son meilleur ami, l’inspecteur Keating, et ce avec un certain succès dû autant à son imagination qu’à sa profonde empathie.

Si la série télévisée a développé ce côté très empathique du personnage et s’est attachée à croquer une très belle galerie de personnages secondaires qui font revivre admirablement l’époque tout en créant une réelle tension émotionnelle. Les romans eux sont plus axés sur les difficultés pour un pasteur à faire cohabiter son intérêt pour le monde et en particuliers le monde du crime et ses devoirs paroissiaux et spirituels. Peut-être au prix du développement de l’entourage du pasteur, beaucoup plus esquissé que dans la série télé. Pour autant après avoir ronchonné un peu au début, je me suis confortablement installé dans l’ambiance de ces nouvelles et pris grand plaisir à la lecture des deux premiers tomes. Pastoral !

Sidney Chambers et l’ombre de la mort (tome 1 ) – 2012 – Sidney Chambers et les périls de la nuit (tome 2) – 2013 – James Runcie – Acte sud noir 2016 – 2017

PS : Il semble que James Runcie se soit inspiré de la vie de son père – ancien archevêque de Canterbury – ce qui explique sa grande connaissance du milieu ecclésiastique, de la liturgie anglicane et des devoirs pastoraux – peut-être du cricket aussi mais cette partie m’a moins passionnée j’en ai peur
PPS :  Oui quand tout est dit, je préfère la série, je l’avoue et j’ai fort envie de mettre la main sur la saison 3…

Je dépasse un peu mais considérons ce billet comme les prolongations du mois anglais de  Lou et Cryssilda

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Le Parfum des fraises sauvages

Dans les années trente, la jeune Mary Prescott tout juste 23 ans, est invitée à passer l’été à la campagne dans la très riche demeure de sa famille par alliance. C’est un été de luxueuse oisiveté qui s’annonce, rythmé par le thé de cinq heures, les excentricités de lady Emily, les bougonneries de sir Henry, des dîners, des promenades et même un grand bal d’été… Tout un monde de frivolité et d’insouciance s’ouvre pour Mary sans compter quelques frissons romantiques…

Publié en 1934, le Parfum des fraises sauvages est un roman plein de la joie de vivre de l’entre deux guerre, de cette frivolité dressée comme un écran devant les souvenirs des deuils de la première guerre et les angoisses de l’avenir face à un monde en train de disparaitre. Petite-fille du peintre Edward Burne-Jones, cousine de Rudyard Kipling et filleule de J.M. Barrie, Angela Thirkell signe ici un roman terriblement anglais, frais et léger comme une coupe de champagne… ou un panier de fraises des bois. Charmant

Le Parfum des fraises sauvages – Angela Thirkell – 1934 – 10/18

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Eleanor Oliphant va très bien

A trente ans, Eleanor Oliphant est comptable dans l’entreprise même qui l’a embauchée à la fin de ses études. Ses semaines sont parfaitement ordonnées, repas, trajet, travail – toujours seule, toujours efficace. Le mercredi elle parle à sa mère, toujours à la même heure ; le week end elle passe le temps en compagnie de deux bouteilles de vodka. En neuf ans, elle n’a pris que trois jours de congé – pour raisons techniques – et il lui semble bien que tout devrait continuer ainsi. Mais un soir, pendant un concert ou elle s’est rendue par devoir, la compagnie de ses semblables lui étant toujours aussi incompréhensible que peu satisfaisante – elle a, à sa considérable surprise, un véritable coup de cœur et décide de changer : de vêtements, de coiffure, de vie en somme. Et ce n’est pas si simple car Eleanor n’est pas tout à fait celle qu’elle parait…

Mais quel merveilleux roman ! On s’attache immédiatement à ce personnage atypique qui apparait tout d’abord simplement asociale, autiste sans doute, barje selon ses collègues, puis révèle des profondeurs insoupçonnées et une terrible capacité à s’émerveiller – ou disons à s’émouvoir. On la suit dans ses réflexions – toujours surprenantes, passant de bons jours en mauvais jours puis en jours meilleurs. Découvrant l’amitié, allant de découvertes en découvertes et réservant aux lecteurs de considérables surprises. A la fois plein d’humour et poignant, allègrement menée et incroyablement confortable, Eleanor Oliphant va très bien est une pépite impossible à lâcher. Surprenant !

Eleanor Oliphant va très bien – Gail Honeyman – 2017 – traduit de l’anglais (écosse) par Aline Azoulay-Pacvon – Fleuve noir édition – 2017

Le billet de Cuné qui m’a donné envie

Cette histoire se déroulant à Glasgow où l’auteure réside, je n’aurais garde d’intégrer cette lecture au mois anglais (même si cette histoire pourrait aisément se passer dans n’importe quel endroit du Royaume uni). Mais comme je tiens à marquer le coup en quelques sortes, je recycle pour vous un vieux logo de ma très ébouriffante cousine Cryssilda qui anime, en ce moment, avec Lou, le mois anglais.

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Lemonade and Lies

Julia South, de retour depuis peu dans son village natal après une séparation douloureuse, reconstruit tranquillement sa vie. Désormais propriétaire d’un café pâtisserie plutôt florissant et depuis peu tutrice d’une jeune sdf qu’elle a embauchée et qu’elle héberge. Elle allie avec brio ses responsabilités de pâtissière toujours en quête de nouvelles saveurs, de commerçante jamais en mal de commérage et ses aspirations de femme troublée par le sémillant inspecteur Baker et dans l’ensemble sa vie est on ne peut plus satisfaisante. Jusqu’à ce qu’elle reçoive une lettre outrageusement violette et parfumée et que l’invitation qu’elle recelait ne se termine en tragédie… L’occasion pour elle de faire montre encore une fois d’une sagacité dont elle n’est pas peu fière.

Cela se sait, je suis une admiratrice inconditionnelle de la grande Agatha, Christie donc… Alors quand on me vante les écrits d’une nouvelle Agatha (auteure ou personnage au reste), je suis toujours partante pour faire un essai. Hélas celui-ci n’est pas toujours transformé et malgré les éloges que j’ai lu partout, ce roman ne m’a guère convaincue (c’était déjà le cas pour Agatha Raisin, deviendrais-je grincheuse ?). Certes Julia est attachante et sympathique avec quand même quelques failles – celui que j’invite pour le thé et qui me sort un sachet de sa poche pour être sûre d’avoir un truc buvable dans sa tasse entendra parler du pays croyez-m’en ! – mais force m’est de constater que les autres personnages sont bien falots et je ne parle même pas du séduisant inspecteur Baker qui mériterait à mon sens d’être remercié séance tenante des services de police pour son effarante incompétence. Enfin incompétence c’est trop dire dans la mesure où il ne mène simplement pas l’enquête dont il est chargé. Je pinaille me direz-vous ? C’est encore possible. Nous ne sommes pas ici dans un épisode des Experts c’est entendu, mais enfin quand il s’avère que les seules photos de la scène de crime sont dans le téléphone de Julia, on peut légitimement se poser des questions non ? Reste l’ambiance plutôt sympathique mais là encore bien peu exploitée. Alors je suis peut-être ronchonneuse mais ici, on est pour moi au-delà du léger pour tomber dans l’inconsistant. Mince !

Lemonade and lies  – Peridale café mystery tome 2 – Agatha Frost – Independently published – 2017 – non traduit

L’avis beaucoup plus enthousiaste de Lou
PS : Il existe cela dit 13 opus des Peridale café mystery (le 13e est en pré vente mais il ne saurait tarder) – 13 tomes en 2 ans ! – et ils rencontrent un certain succès

PPS : et puis c’est une bonne occasion de lire en anglais, la langue ne présentant aucune difficulté.

C’est le mois anglais chez Lou et Cryssilda

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Le Chagrin des vivants

1920, l’Angleterre se prépare à officialiser son deuil en célébrant un mort – ce soldat inconnu qui représentera tous les autres – le 11 novembre, anniversaire de la victoire – si victoire il y eu – et nouveau jour férié dédié au souvenir.  Durant les cinq jours nécessaire au voyage du corps des boues du nord de la France au parvis de Westminster, trois femmes, trois femmes ordinaires, vivent, s’interrogent, se disloquent et se réparent dans l’attente de cette journée qui devrait marquer le passage vers autre chose, une vie nouvelle, un printemps en novembre, la renaissance de l’espoir. Mais comment faire quand à chaque coin de rue, des hommes au regard et aux manches vides, après avoir tout donné fors la vie en sont réduit à mendier pour survivre…

Hettie danseuse professionnelle, rêve d’ailleurs, d’une vie meilleure mais doit à 19 ans faire vivre sa famille amputée du père et malade du fils revenu intact mais brisé. Evelyn se punit encore et toujours d’avoir survécu à son fiancée et refuse que le monde continue sa course. Ada voit son fils partout, s’enfermant dans un monde de fantômes ou ce sont les vivants qui perdent leur substance. Autour d’elles, un Londres meurtri, encore marqué de ruines et de cratères et surtout hanté par ces hommes cassés qui peinent à retrouver une place dans un monde qui aimerait effacer jusqu’au souvenir de ce qu’ils ont vécu. Mais peut-être une grande communion autour d’un cercueil anonyme pourra-t-il réaliser l’impossible et cautériser les blessures.  Le chagrin des vivant est roman excellemment construit et magnifiquement écrit, à la fois sensible et juste sur ces années d’après guerre qui furent si dures aux survivants, mais aussi sur la résilience comme une lueur au bout du chemin. Une auteure à suivre. Superbe.

Le Chagrin des vivants – Anna Hope – 2014 – traduit (fort bien) de l’anglais par Elodie Leplat – Gallimard – 2016

C’est le mois anglais chez Lou et Cryssilda

 

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Belgravia

Bruxelles 1815, Napoléon avance, l’armée anglaise le guette et la duchesse de Richmond donne un grand bal où toute la bonne société anglaise – traduisez les officiers et leur famille – a rendez-vous. Pourquoi et comment la famille Trenchard a-t-elle été invitée ? Voilà qui interroge de nombreux invités. Certes le dénommé Trenchard est l’approvisionneur clé de l’armée et de ce fait fort apprécié de Wellington, mais enfin un commerçant et de basse extraction qui plus est ! Quoiqu’il en soit le bal est interrompu par la bataille de Waterloo et la jeunesse doré du royaume durement décimée. Trente ans plus tard, Trenchard a encore grimpé dans l’échelle sociale, contribué à la construction du tout nouveau quartier de Belgravia et sa fortune ne se compte plus. Pour autant il n’est toujours qu’un parvenu, plutôt vulgaire de surcroit et sa femme n’apprécie guère qu’il l’oblige à fréquenter des salons où on lui bât froid, quand bien même à la surprise des dames présentes, on la trouverait en grande conversation avec cette trop fameuse duchesse de Richmond ou quelque autre membre de sa famille… de là à penser qu’un quelconque secret les lie…

J’aime la plume de Julian Fellowes. Amoureux d’une certaine Angleterre, de ses castes et de ses fractures, il ausculte – que dis-je il dissèque – avec une jubilation plus fascinée que nostalgique, les mentalités complexes – et pour nous exotiques – de ses personnages. Je me le représente toujours sous les traits d’Ivor Novello (bon d’accord de Jeremy Northam mais avouez qu’on imagine pas autrement le parfait gentleman)  le pianiste de Gosford park – raillant de l’extérieur mais avec indulgence une société qu’il connait bien. Moins original que Snobs, à mon sens, qui égratignait avec bonheur l’anachronisme contemporain et si décalée de la noblesse anglaise, Belgravia nous plonge agréablement – presque confortablement serais-je tentée de dire – dans un Londres en transformation, les nouveaux quartiers si victoriens poussent de tout côté, et dans une une époque ou l’argent d’une nouvelle race de capitaine d’industrie leur permet de côtoyer les bastions jusque là bien gardés de la gentry voire de l’aristocratie, toutes deux fort désargentées et quelque peu indignées de l’être. Peut-être pourrais-je lui reprocher de trainer un peu en route alors que l’on voit fort bien où il veut en venir et que l’épilogue aurait pu arriver un rien plus tôt à mon goût mais je ne bouderais pas mon british plaisir. Victorien !

Belgravia – Julian Fellowes – 2016 – traduit de l’anglais par Valérie Rosier et Carole Delporte – JCLattès  – 10/18

C’est le mois anglais chez Lou et Cryssilda

PS Au cas où, je précise que Julian Fellowes est le scénariste de Gosford park de Robert Altman donc (à voir absolument) et le producteur scénariste créateur de Downton abbey (idem) – un homme qui connait son affaire 🙂

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Coulisses de blog…

“La perfection de l’esprit consiste à savoir se cacher à propos.”
Hyacinthe de Charencey 1888
 
Au moment d’écrire mon premier billet pour le mois anglais de Lou et Cryssilda (mais si, mais si, je lis anglais), surmontant ma procrastination légendaire (lectures anglaises 4, billets zéro à ce jour) je tombe sur le tag de cuné sur les coulisses de son blog, immédiatement suivi de celui de Jean-Marc… Je suis innocente votre honneur, ils m’ont tentée (et taguée en ce qui concerne Cuné). Le billet, que dis-je les billets anglais attendront…
Avis, Critique, Recension et/ou Ressenti ?
Chroniques ! Et chroniquer c’est partager ses ressentis du moment mais un tantinet argumentés quand même parce que juste “waaaa c’que c’est bien” ou “berk c’que c’est nul” c’est moyen comme intérêt, pour celui qui lit comme pour celui qui écrit. Alors je restitue, clame et sautille sur ce qui m’a plu, que j’ai trouvé bien vu, excellent, ébouriffant, et – bien sûr – ce qui à mon sens marche moins bien, m’agace ou simplement n’est pas ma tasse de thé. Le plus souvent j’essaie de donner envie parce que c’est ma nature, enthousiaste et mal peignée, et puis il y a trop de livre à lire dans le monde (et dans ma pal) pour que je m’astreigne ; du coup si je finis un livre – et a fortiori si je le chronique – c’est qu’il m’a plu d’une façon ou une autre. Ou alors – mais c’est rare – il faut qu’il m’ait agacée mais de chez agacée et là on est plus dans le procédé ou l’imposture…
Le choix du livre
Depuis presque douze ans maintenant, mes tout premiers prescripteurs sont les blogs – et essentiellement les vieux blogs – en écrivant ça je me fais peur, j’ai quel âge déjà. Bon faut dire qu’avec le temps je sais avec qui j’ai des atomes crochus de lecture – genre j’aime 99% de ce qu’elle aime – Karine, ou à peine moins – Cuné pour ne citer qu’elles. Après c’est open bar, un titre qui claque, une couverture aguichante (et je ne parle pas de torses masculins nus hein, on frôle l’overdose depuis quelques temps), une quatrième de couv bien faite (ça arrive), un entrefilet dans un magazine (Bon d’accord des fois j’achète le magazine littéraire, et Lire et…), mon fil facebook, un truc qui passe à la télé, le bouquin dont on parle à la radio (vous connaissez la Fabrique de l’histoire sur France C. et bien c’est un sacré prescripteur pour moi) et puis les amis bien sûr, mes enfants maintenant – juste retour des choses – oui enfin n’importe où, n’importe quand, je suis une femme versatile.
Cas particulier : Parfois, pas besoin de choisir, les livres viennent à toi via les SP, ou Service de presse
Cela arrive bien sûr quoique moins souvent qu’autrefois je dois perdre en influence (mouhahaha) mais de toute façon, même s’il est toujours agréable de trouver un livre dans sa boite aux lettres, je n’en parle jamais. A moins que j’ai demandé le livre, mais cela a dû arriver quoi deux fois en douze ans, je ne me sens aucune obligations ni de lecture ni d’autre chose alors quel intérêt…Je parle du bouquin s’il m’a plu et voilà.
Mettre ou ne pas mettre la quatrième de couverture ? That is the question
Mais pour quoi faire morbleu ? et dans quel but  ? C’est le paragraphe que je saute dans les billets de blog qui le recopient. Mes chroniques sont (presque) toujours construite de la même façon, un paragraphe dans le genre du “si vous avez manqué le début” des magazine télé de mon enfance et un paragraphe d’avis, de commentaires, de ressentis, de ce qui m’est passé par la tête à la lecture. Sauf parfois, où je me laisse emporter mais jamais par un quatrième de couverture que le grand tolkien m’en soit témoin.
Prise de note
Je lis dans mon lit, dans le métro, dans les toilettes (chut), en marchant, devant la télé, sur la plage, dans la voiture, au café, au resto… comment diable pourrais-je prendre des notes. Bon par contre, je corne pour retrouver une citation… oui je l’avoue, je suis une corneuse du diable, mea maxima culpa. (D’ailleurs les liseuses c’est moins bien pour ça, on peut laisser des notes hein mais justement je préfère corner héhé.)
Rédaction
Ah c’est là que le bât blesse et que ma nature contemplative de flemmarde procrastinatrice s’expose à la face du monde bloguesque (qui en a vu d’autre). Alors en théorie j’écris dès que j’ai fini un livre et avant d’en commencer un autre. Oui mais non. en vérité certains livres demandent à être ruminés (c’est vrai mais quelle excuse) et en pratique je chronique peut être un dixième de ce que je lis. Oui je sais c’est mal… mais je songe à m’améliorer… si, si,  depuis que j’ai commencé à bloguer même. En revanche quand je me décide, je peaufine, je coupe, je synonyme, je réécrit, je relis, je corrige, je cherche ce p… de mot qui veut juste dire ça et qui m’échappe, je me demande si j’ai une maladie neurologique qui m’empêche de trouver ce foutu mot, je coupe, je précise, je cherche une référence, je coupe encore, je relis, ça n’en finit pas…
Serré ou plutôt long ?
Serré, serré… J’aime mon café long et mes billets courts. (je passe mon temps à couper, couper, couper). bon évidemment il y a des exception, parfois ça coule tout seul et j’ai BEAUCOUP de choses à dire. (D’aucuns prétendent que je suis parfois bavarde mais c’est très exagéré, je suis peut-être un tantinet enthousiaste voilà tout.
Divulgâcher, moi ! Jamais
Jamais ! Remarquez que personnellement je n’en ai cure. Je suis une adepte du coup d’oeil au dernier chapitre pour voir et je déteste le suspens. Pour moi un livre qui perd son intérêt quand on en connait la fin ne mérite pas qu’on le finisse. Sinon lirait-on encore des classiques ou mieux relirait-on ? et je suis une grande relectrice y compris de polars donc… D’ailleurs ça aussi c’est un des aspects de la liseuse qui me plait moins, c’est bien plus difficile de jeter des coups d”œil anticipatifs mais enfin elle a d’autres avantages. Pour en revenir à nos moutons et nos spoils, je n’écrit pas – que – pour moi et donc – pour le salut de mes lecteurs – j’évite de révéler quoique ce soit – mais rien de rien – des intrigues que je chronique – si ce n’est le tout début histoire de donner envie… Et je suis très pointilleuse sur le rien de rien. C’est très amusant parfois, un tour de force d’autre fois – je me souviens que pour expliquer à quel point il FALLAIT lire La Tâche de Roth sans rien divulgâcher je me suis bien creusé les méninges.
Ils en pensent quoi les autres blogueurs ?
Une question que je me pose toujours ! Les blogueurs et les critiques d’ailleurs, je ne suis pas sectaire. Leur lecture m’aide à préciser mon avis, trouver un autre angle de vue, me démarquer un peu car qui aime lire dix fois la même chose. cela ne modifie pas mon ressenti mais me permet de nuancer. Ce doit être un (très) vieux réflexe d’étudiante, “avant d’écrire, tu liras tout ce qui existe sur le sujet” oui enfin tout, n’exageront rien… Et je tague les billets qui me plaisent bien sûr.
Citation
Parfois… certains auteurs (parlons d’Oscar, si meilleur libelliste que romancier – pas taper) ont l’art de la formule qui fait mouche et c’est quelque chose que j’admire absolument alors je cite mais il faut que cela s’insère dans le billet tout ça tout ça… question de temps, d’humeur et d’admiration.
Tagger ses billets
Certes, j’ai des catégories – roman québécois, polar, sfff et parfois même des mots clé, histoire qu’on s’y retrouve après je ne suis pas un parangon de rigueur loin de là
Noter ses lectures
Que nenni… Ce serait donner à mon avis une sorte de valeur absolue à laquelle je ne crois guère et puis les notes c’est toujours réducteur… admettons qu’un jour je lise Will, Hamlet genre, je lui mets 5 étoiles the max parce que c’est Will et parce qu’il écrit comme si dame poésie elle-même lui chuchotait à l’oreille. Le lendemain je lis un Fred Vargas, que j’aime d’amour, et je lui mets 5 étoiles parce que pelleter des nuages c’est mon truc. Le surlendemain je croque un Angela Morelli – les seuls romances que je lis et relis – et je lui mets 5 étoiles parce que j’ai ris et pleuré ? pfffff comme dirait mon bien aimé Han, tout ça c’est du flan. (après chacun fait comme bon lui semble et puis le flan c’est bon, évitez de me dénoncer au mouvement de libération des flans, vous serez bien urbains)
Les affiliations
Je lis pour le plaisir, j’écris pour le plaisir et le plaisir seul… j’ai arrêté les “partenariats” parce que je n’aime pas la contrainte,  changé de plate forme parce que C’EST QUOI CES POPUPS TOUT POURRIS, même quand je m’inscris à des challenges – genre le mois anglais – je les fais à moitié,  ce n’est pas pour tomber dans un Charybde quelconque…
La reconnaissance
Ricanement mumblyesque (les vieux reconnaitront) – Allez que les 5 lecteurs de ce blog se dénoncent… sérieux je ne sais pas bien ce que cela signifie, j’aime qu’on commente mes billets parce que j’imagine qu’on les a lus et que cela me fait plaisir forcément. J’aime que les gens reviennent en me disant qu’ils ont adoré un livre lu sur mon conseil – alors là oui, le roi n’est pas mon cousin. Je tremble de malepeur quand quelqu’un me dit qu’il a acheté un roman à cause d’un de mes billets. (et s’il n’aimait pas, ce serait ma faute ma très grande faute – une pensée pour toi Lou de libellus qui me l’a souvent faite celle-là). Est-ce de cela qu’il s’agit quand on parle de reconnaissance ?
Ah si ! une année – il y a longtemps bien longtemps – j’ai été invitée au Printemps des mots de Toulouse en tant que blogueuse avec un badge et tout… alors ça c’était chouette, j’ai entendu Bernard Giraudeau lire des passages d’un de ses romans, quelle voix il avait cet homme en plus du talent. J’y avais rencontré Papillon aussi.  C’est de la reconnaissance ça ? En fait c’était surtout moi qui était reconnaissante.
Voilà vous savez presque tout sur ma cuisine bloguesque, dont l’essentiel, j’ai ouvert ce blog pour parler de livres quand j’étais sevrée de ce genre de conversation et j’aime toujours autant en parler, en écrire et en lire. Alors irl ou par blog, email ou tout autre moyen à votre convenance, si c’est de livres dont il s’agit, je suis là 😉
Je crois que Cuné a tagué tout mon monde bloguesque mais  gens qui passez par ici, si ce tag vous tente, rappelez vous Giacomo (à moins que ce ne soit Oscar ou quelqu’un qui se prenait pour eux deux à la fois) : Hâtez-vous de céder à la tentation, de peur qu’elle ne passe
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Le mois anglais – le retour – saison 7

Depuis bientôt sept ans (à ce qu’on m’a soufflé parce que la mémoire des chiffres et des dates m’est on ne peut plus étrangère) le mois de juin sonne le retour des lectures anglaises (non qu’elles nous quittent le reste de l’année mais enfin disons que c’est un focus) et chaque année, depuis l’aube des temps bloguesques, je participe plus ou moins, avec plus ou moins de constance et d’endurance mais toujours beaucoup d’enthousiasme car la littérature anglaise et moi, c’est une folle histoire d’amour. Et cette année ne fera pas exception, clamons-le haut et fort.

Que lirai-je ? Je ne sais guère. J’ai pioché les noms de Anna Hope et Susan Hill  dans le programme de cette année que vous trouverez chez Cryssilda et Lou. J’ai également relevé celui d’Agatha Frost qui pourrait être amusant et m’obliger à lire en anglais, j’ai aussi un Julian Fellowes qui m’attend gentiment (Belgravia, fait-on plus anglais). Et en parlant de cela, voilà bien longtemps que je n’ai pas lu dame Agatha (The One) dans la langue de Will, ce pourrait être une bonne idée avec un petit classique en dessert… Et toutes les bonnes idées qui me viendront d’ici la fin du mois. Restera à voir ce que j’aurais l’énergie de chroniquer mais ne crions pas avant d’avoir mal, haut les coeurs fidèles lecteurs et lectrices de la perfide Albion* et toute cette sorte de chose. A nos lectures !

Slainte**


*Que voulez-vous j’ai le nez dans un roman iranien en ce moment et les anglais n’y ont pas le beau rôle.
**Cheers (en gaélique dans le texte)

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Une plaie ouverte

Quand nous chanterons le temps des cerises,
Et gai rossignol, et merle moqueur
Seront tous en fête !

Trente ans après la semaine sanglante qui mit fin à la commune de Paris, Marceau croit reconnaitre un figurant de l’un des premier western de l’histoire. Dana, condamné à mort par contumace, camarade de lutte, de folie et de beuverie. Peut-il être encore vivant, quelque part dans l’ouest profond ou beaucoup plus près, être encore lui-même quand les derniers communards s’éteignent, rangés, perdus ou amnésiques. Dans l’esprit confus de Marceau embrumé de laudanum, miné par le passé, l’obsession grandit, le lançant à la poursuite de ce qui pourrait bien être l’ombre d’un souvenir…

« C’est une sacrée histoire que celle-là. Vraiment. Pourtant, espérer qu’il la raconte serait aussi vain qu’attendre le retour d’un mort. L’homme, s’il a existé ailleurs que dans la fumée d’une pipe ou les sornettes d’un vieux, on se contentera d’en chercher la trace. Rien, ou presque, ne garde son empreinte. À croire qu’il marchait sur des semelles de vent. Comme l’autre, qu’il aurait connu jadis et qui, pareillement, a tout brûlé derrière lui. »

Est-ce donc polar ? je dirai non. Est-ce un roman noir ? peut-être. Une enquête ? c’est trop dire mais une quête certainement… Étrange livre que cette plaie ouverte qui nous met inlassablement dans la tête l’air du temps des cerises*. Tout d’abord, on ne sait trop où l’on est, ni où l’on va, encore moins quand… l’Ouest lointain, Calamity Jane, le Wild West Show, la main du mort de Wild Bill Hickock tout cela est bien confus. et puis peu à peu les choses s’installent, se décantent, on est en France pendant ces quelques semaines fiévreuses de mai, enthousiastes, fraternelles, tragiques, enivrées par l’espoir, noyées dans le sang. La Commune, encore aujourd’hui, est un lieu de fantasmes et de légendes – comme l’ouest américain maintenant que j’y pense – et l’auteur connait l’époque sur le bout du doigt. On y croise Courbet, Rimbaud, Vallès… On a beau savoir, pour un peu on espèrerait. On suit Marceau, à jamais survivant plus que vivant. Si je devais mettre un bémol à ce roman à la construction décoiffante et au style flamboyant, ce serait Marceau lui-même, narrateur dont on ne sait presque rien – mais peut-être est-ce aussi son cas – et auquel on ne s’attache pas plus. Alors évidemment, à trop balader ses lecteurs, on prend un risque, celui de les perdre en route tant il faut un certain temps pour entrer dans l’histoire… mais pour celles et ceux qui s’accrochent, c’est un plaisir. Foisonnant !

J’aimerai toujours le temps des cerises :
C’est de ce temps-là que je garde au cœur
Une plaie ouverte !

Une plaie ouverte – Patrick Pécherot – 2015 – Gallimard
Les avis de l’oncle Paul et du Papou

*Si la chanson n’a pas été écrite pour la Commune, elle lui reste pour toujours associée et d’ailleurs Jean-Baptiste Clément n’était-il pas un communard… Tiens pour la peine, je vous laisse avec un souvenir de ma dernière balade au Père Lachaise (haut lieu de la Commune et du roman donc…)

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L’écrivain des ombres

Et voilà Philou est mort ! Non je ne parle pas de mon chat mais bien de Philip Roth, sans aucun doute un des plus grands écrivains qui fut. J’ai donc décidé de partager avec vous un de mes vieux billets – grand Tolkien  onze ans déjà ! – histoire de vous donner envie. Car quand tout est dit, il reste qu’il FAUT lire Philou. Depuis deux jours, en lisant tout les articles, nécro et autre hommages qui lui sont consacrés – le plus intéressant est chez Thom, je ne saurait trop vous le recommander – j’ai vu fleurir le mot burlesque pour parler de son approche et je me suis dit que j’aurais plutôt utilisé grotesque, non pas pour ces romans eux-même mais bien pour les situations dans lesquels il met ses personnages et le point de vu qu’il choisit d’adopter.  Dans le Mystère de Wysteria lodge, Watson donne comme définition du mot grotesque : bizarre, ridicule, remarquable, ce à quoi Sherlock lui répond que ce mot implique surement quelque autre chose, du tragique voire du terrible. Et c’est bien une des forces de Roth de nous servir du terrible avec un humour à la fois si absurde et si corrosif qu’on reste ébouriffée par tant de pertinence et de virtuosité. Je vous laisse donc avec l’écrivain des ombres mais vous trouverez les billets sur la trilogie américaine au bout de ces liens : La Pastorale américaine ; J’ai épousé un communiste ; La Tâche. Enjoy
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rohtghost.jpgL’écrivain des ombres marque la naissance d’un des plus fameux doubles littéraires de Philip Roth, le tout jeune écrivain Nathan Zuckerman, plus tard narrateur vieillissant de la trilogie américaine.

Le roman s’organise en quatre chapitres étrangement disparates et pourtant intimement lié autour d’un thème : la signification profonde de l’état, à moins que ce ne soit du métier ou encore de la fonction d’écrivain !
Dans le premier chapitre, le narrateur explore l’écrivain comme modèle, à travers sa rencontre avec son maître en écriture et s’attarde sur la distance qui se révèle entre l’homme et le personnage public ou rêvé lorsque passant de la lecture à la vie, l’élève “voit” réellement le maître.
Dans le second il s’attaque à une question en quelque sorte indissociable de l’oeuvre de Roth : Que signifie donc être un écrivain juif ? Peut-il rester lui-même et explorer son propre univers quand la communauté qui l’a soutenu, encouragé et porte d’une certaine façon son identité, l’investit de ses attentes et lui assigne, ou plutôt tente de lui assigner, des devoirs envers sa famille, sa communauté, mais aussi tous les juifs ? Questionnement qui trouve son point d’orgue lorsque la propre mère de Nathan, affolée par les réactions négatives à une nouvelle de son fils, lui demande tout bonnement s’il est vraiment antisémite. Se rendant compte à moitié de l’absurdité de la chose mais incapable de renier en bloc les opinions d’une communauté qui donne tout son sens à sa vie. Il n’y a que Roth pour vous faire rire avec un sujet pareil, à la fois absurde, profond, cynique et déchirant.
Le troisième chapitre permet à notre narrateur en plein délire de projeter la question sur une jeune femme qu’il a brièvement croisé chez son fameux “maestro”. Il imagine sous le physique fascinant de la belle étrangère une Anne Franck rescapée de Belsen qui, apprenant sur le tard la survie de son père lors de la publication de son fameux journal, choisit de garder le silence pour laisser à son témoignage “posthume” toute sa force d’impact sur la prise de conscience post-holocauste. Quitte à renier son identité et se condamner elle-même à une infinie solitude. Étrange avatar de l’agneau sacrificiel offrant son identité au monde d’après-guerre !
Le dernier chapitre enfin boucle la boucle et revient sur le quotidien du “célèbre écrivain” et ce qu’il peut avoir d’invivable pour son entourage.  Est-ce cela finalement être écrivain : donner son temps et son âme à l’écriture en lui sacrifiant tout et d’abord ses proches ?
D’une construction plus rigide que les romans de la trilogie américaine, L’écrivain des ombres est dans un premier temps un peu déstabilisant voire frustrant.  Le changement de focale à chaque chapitre prive de chaleur humaine les marionnettes de Roth, à l’exception notable de Zuckerman et de sa famille, et les maintient à mon sens à l’état d’archétypes. A l’arrivée pourtant, ces personnages mettent en scène une très belle réflexion sur le métier d’écrivain et sur la signification profonde d’un tel engagement envers soi-même, avec ses contraintes et ses ruptures. Remarquable !

L’écrivain des ombres – The ghost writer – Philip Roth – 1979 – Gallimard 1981 – traduit de l’anglais par Henri Robillat.

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