Enquête sur la disparition d’Emilie Brunet

couvbello.jpgEmilie Brunet, riche héritière, a mystérieusement disparu. Son mari, qu’elle était en passe de quitter, est le coupable tout désigné. Tout le monde s’accorde là-dessus, lui-même d’ailleurs ne prend pas la peine de nier. Rien de bien mystérieux donc et l’affaire devrait être vivement pliée. Malheureusement la police se heurte à une telle absence de preuve – à commencer par le corps, qu’elle ne voit de salut que dans la consultation de son plus fin limier – Achille Dunot – aujourd’hui à la retraite. Un écueil cependant et de taille, Achille est atteint d’amnésie antérograde, en clair depuis un accident survenu quelques années plus tôt, son cerveau n’enregistre plus et chaque période de sommeil efface irrémédiablement la journée écoulée. Qu’à cela ne tienne, notre détective, charmé d’être encore utile, utilisera un journal de bord pour ne rien perdre de son enquête. De plus il a deux alliés de poids, le plus grand détective (du moins à son avis) de tous les temps, Hercule Poirot, dont il connait chaque enquête sur le bout de ses synapses intactes et sa créatrice la très sagace dame Agatha Christie dont les techniques d’investigation policière n’ont aucuns secrets pour lui. A eux trois, viendront-ils à bout de cette trop simple affaire ? cela reste à voir…

Que voilà un étrange OLNI (Objet littéraire non-identifié), est-ce un Whodunit (en français, un roman policier à énigmes) ou un pastiche du genre ? Est-ce un hommage au-dit genre et à son incontournable zélatrice ou plutôt une parabole sur l’insoutenable intangibilité de la réalité, entièrement dépendante du filtre de nos perceptions ? Et si énigme il y a, est-ce bien celle que l’on imagine ?

Dans ce roman à tiroirs, truffé de références christiennes, le lecteur s’interroge et s’interroge encore tout comme le narrateur auquel il en vient à s’identifier puisque tout comme lui, il n’a de contact avec l’affaire que par l’intermédiaire du journal – seul réalité tangible pour l’un comme pour l’autre. Ces notes, rédigées, télégraphiques, raturées, ne trouvent souvent leur explication qu’au détour d’une page ou le scripteur s’explique enfin pour nous dire juste après que le matin même, il s’est longuement interrogé sur la signification de ces allusions et biffures. De cet emboitement à l’infini nait un roman intrigant, au style volontairement simple, comme Agatha dit-il mais là je regimbe un tantinet, à l’histoire finalement surprenante (un tour de force quand on y pense bien) et d’une lecture fort agréable.

Alors je pourrais pinailler sur le côté un peu démonstratif des références à la dame du crime mais je suis peut être victime d’un biais personnel, dans la mesure où les connaissant déjà fort bien, je n’avais pas besoin de tant d’explications. Plus grave nous n’avons pas les mêmes préférences en la matière (personnellement j’aime beaucoup Carte sur table et La plume empoisonnée non mais !). Affaire de goût certes, mais quand on rencontre quelqu’un d’aussi obsédé que soi par un auteur, on aimerait qu’il partage nos prérérences, c’est humain non? Christien !

Enquête sur la disparition d’Emilie Brunet – Antoine Bello – 2011 – Gallimard

L’avis de monsieur Papou qui a été un peu frustré s’attendant à un polar que ce roman n’est effectivement pas… tout à fait 🙂

PS : Une seule référence m’a laissée perplexe, La disparition de monsieur Davenheim – après recherche je n’en ai réellement aucun souvenir. Bien que l’intrigue semble avoir quelques rapports avec l’aventure de la cuisinière de Clapham, ce sont deux nouvelles distinctes. Shame on me… et de la relecture en vue !

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