Tu peux toujours prendre l’air compétent et professionnel pour annoncer qu’à Shanghaï il y a deux mètres carrés de logement par habitant, mais que sais–tu de la manière dont on vit à une demi–heure des tours de Notre–Dame ? Tu te moques de tous ces gens qui vont faire un petit tour en Chine et qui en rapportent un livre, mais toi, que serais–tu capable de rapporter de La Courneuve ou de Bobigny–Pablo Picasso où mènent les métros que tu prends tous les jours dans le pays où tu vis ? (…) Es–tu jamais descendu, rien que pour voir, à Sevran–Beaudottes ou aux Baconnets, ces stations où tu passes si souvent, depuis tant d’années...
L’idée du voyage c’est lui qui l’a eue, il noterait, elle photographierait. Ni enquête, ni reportage, ce serait un simple voyage touristique sac au dos, de la plaine de France au pays d’Hurepoix, de Roissy à Saint-Rémy-lès-Chevreuse, 38 gares, 50 kilomètres en sautant Paris, un mois de voyage. Descendre à chaque gare, trouver un hôtel, se promener, entrer dans les musées, visiter les hauts lieux, voir quelques spectacles, parler aux gens, amis, connaissances, inconnus qui vivent en ces contrées qu’on ne fréquente qu’en passant : tel était le programme. Un programme à bousculer forcément, sait-on bien comme il peut être difficile de trouver un hôtel à Aubervilliers ou au Bourget ?
Et c’est ce qu’ils firent et près de 30 ans plus tard, il nous reste ce bijou de livre. Un voyage au long court de gares en cités HLM, de vieux centre en zones pavillonnaires, de musées improbables en hôtels imprévus, et des rencontres… Surtout des rencontre. Car ce qui ressort de cette lecture, c’est une immense humanité, beaucoup d’humour et peut-être un zeste de regret quand au détour d’une page, on est étreint par l’étonnante actualité d’une description pour quelques lignes plus loin se demander ce qu’il reste de cet autre endroit. Là où la petite histoire croise la grande, de “grands ensembles” à l’écart de tout, sinistrés par la fermeture d’une usine, à la triste cité de la Muette à Drancy – et dire que j’ai habité Drancy sans jamais m’interroger sur cette histoire, des folies aériennes du Bourget aux fortifs d’Aubervilliers, des luttes de la Commune au massacre du 17 octobre, c’est notre histoire qui s’écrit, mêlée à la douceur cossue ou la misère noire des vies ordinaires. Un parcours atypique, passionnant, un rien nostalgique parfois – en tout cas pour ceux vivent ou ont vécu dans ces eaux, poétique peut-être, bellement illustrée de photos aussi familières que dépaysantes. Superbe !
Les passagers du Roissy express – François Maspero et Anaik Frantz – 1990 – le seuil
De François Maspero, j’ai lu aussi Des saisons au bord de la mer qui m’a enchantée et dont je vous parlerai un jour et je compte bien tout lire. J’aime cet homme qui s’est éteint hélas en 2015.
Ouhlala mais que ça me plaît bien ce récit de voyage totalement insolite et pourtant oui, pas moins intéressant qu’un voyage dans des contrées lointaines. Je note, je note !
Belle lecture alors… j’ai eu du mal à m’en éloigner tellement j’étais plongé dedans 🙂
Comme A girl, c’est complètement mon genre de lecture décalée, et comme je le subodorais, c’est dans ma bibli, OK, au magasin, mais j’ai espoir!
Merci.
Je l’ai en poche, peut être que le grand format vaut la peine pour les photos 🙂
Parle-t-il de Bécon-Les-Bruyères, Courbevoie ou Nanterre-La-Folie ?
Le Papou
Hihi ce n’est pas la bonne ligne Nanterre c’est le RER A (mais je ne connais pas la station Nanterre-folie), Bécon-les-Bruyères et Courbevoie c’est le train à partir de la gare Saint-Lazare je pense… tout l’ouest de Paris reste à explorer en fait 🙂
Un voyage insolite qui me tente, maintenant.
très insolite, très exotique et très familier à la fois 🙂
Je l’avais noté à sa sortie, puis perdu de vue ; là, il me le faut.
Ah ça c’est bien, faire ressortir un livre de l’oubli 🙂
Je crois que j’adorerais découvrir ce périple pour le moins surprenant !
Je pense que ça pourrait te plaire 🙂 il y a beaucoup d’humanité dans ce voyage 🙂