La Saga de Ragnarr aux Braies velues, ou Ragnars saga loðbrókar, probablement transcrite au XIIIe siècle, est l’une des plus célèbres sagas dites “des temps anciens”, les Fornaldarsögur ou sagas légendaires. Elle est traduite ici du norrois par Jean Renaud avec deux autres textes liés, le Dits des fils de Ragnarr composé sans doute à la même époque et le Chant de Kráka, poème scaldique du XIIe siècle qui donne la parole au héros – Ragnarr donc – dans un chant de mort des plus guerriers.
Avouons tout, battons notre coulpe. Un peu après tout le monde j’ai découvert entre noël et jour de l’an la série irlando-canadienne Vikings. Et bien entendu pour qui connait mes faiblesses pour le haut moyen-âge, les guerriers chevelus et les cultures anciennes, j’ai hautement apprécié et, mieux, je ne me suis pas lassée au bout de quelques épisodes (fait devenu rarissime en matière de série, allez savoir pourquoi) (je suis au milieu de la saison 3 et la bonne nouvelle est que la quatrième arrive). Or il se trouve que la série en question s’inspire directement (quoique en réarrangeant les motifs à sa convenance) de la légende du très fameux Ragnarr, légende relatée, entre autres, par ces trois récits en norrois. Pouvais-je résister ? Je pose la question et je réponds, non bien sûr. Et, comme prévu, je me suis régalée tant à la lecture pleine de bruit et de fureur des textes eux-même qu’à celle de la postface éclairante et érudite de Jean Renaud.
Et ce Ragnarr Loðbrók (aux braies velues sonne moins bien en français, allez savoir pourquoi) n’est pas n’importe qui, si j’ose ainsi m’exprimer. Il occupe une place singulière dans l’imaginaire occidental, non seulement parce qu’il est réputé être à l’origine des premiers raids nordiques en Angleterre et en Francie mais aussi parce que ses aventures légendaires, forgées entre le neuvième et le treizième siècle, traduites en latin au XVIIe et redécouvertes par les romantiques, sont à l’origine de l’image populaire du “Viking”, guerrier des mers, trinquant dans un crâne (mauvaise traduction issu du Chant de Kráka– la “branche courbe du crâne” du poème désignant prosaïquement une corne à boire) et courant à la mort en riant, sa hache à la main, pressé de rejoindre le banquet d’Odin.
“Joyeux, je vais sur le haut siège
boire la bière avec les Ases ;
tout espoir de vie a disparu,
en riant je mourrai.” (Chant de Kráka, dernière strophe)
De même, la seule évocation d’un supplice de l’aigle de sang (une belle horreur nullement attestée historiquement) vient de la saga de Ragnarr, ses fils l’ayant infligé au roi Ella de Northumbrie pour venger leur père. (je rassure les amateurs de la série, bien qu’inspirée par la matière ragnarienne, elle a changé ce trait particulier, ceci n’est pas un spoiler).
Tel un Arthur du nord, Ragnar est donc un roi-héros essentiellement légendaire, peut être inspiré d’un ou de plusieurs personnages historiques, à la croisée de multiples récits, scandinaves, saxons, irlandais, francs, transcrits en diverses langues. Il aurait conquis Lagherta – une valkyrie ? – en, combattant un ours et un chien, Þóra en tuant un serpent géant, épousé la fille de Sigurd le tueur de dragon et de Brynhildr la guerrière, découvert la route de l’ouest, pillé les royaumes saxons, guerroyé en Écosse et en Irlande, remonté la Seine pour mettre le siège devant Paris, eu de nombreux fils, fameux pour leurs exploits. Aujourd’hui au coeur de la série Viking, mais aussi personnage de plusieurs jeux vidéo, on le retrouve dans des bd, des romans (de Chateaubriand à Jack London en passant par Hugo et Sue, rien que cela !), la musique Heavy Metäl* (littéralement habitée par les légendes nordiques) – il est l’Archétype du découvreur guerrier, un rien cruel et sanguinaire avide d’horizons, de combats et de découvertes.
Et les récits me direz-vous ? Comme toujours dans les sagas, les faits sont brutes et le style direct, foin de politique subtile ici mais le souffle de l’épopée est bien là, resplendissant de sang et de fureur, de haches et d’épées, de batailles et de banquets, de hauts faits d’arme, de trahison et de vengeance. Épique !
La Saga de Ragnarr aux braies velues suivi du Dits des fils de Ragnarr et du Chant de Kráka– XIIe et XIIIe siècle – traduit du norrois par Jean Renaud – 2005 – Anacharsis éditions
PS : Au cas où je n’aurais pas été bien claire, je conseille la série, je conseille absolument.
PPS : D’après mon fils, métaleux de choc, Heavy Metäl prend un tréma !
J’aime beaucoup la série, mais de là à lire cette saga, il y a un pas que je ne suis pas certain de franchir.
Ah bon tu n’aime pas les histoires épico-fantastiques du XIIIe 😀 bon c’est particulier je te l’accorde mais rafraichissant aussi, je compte bien les lire toutes… un jour… mais j’y vais doucement. L’Edda en prose a été un grand choc pour moi, j’ai adoré, mais bon je suis un peu chtarbée, je le sais bien. 😀
Et bien moi, j’ai attendu 2016 pour découvrir la série… Nous sommes en plein dans la saison 2, et j’aiiime !
je me suis régalée du début à la fin 🙂 superbe série
Y a des petits cœurs mous qui sont plus solides qu’ils pensent. 🙂
Le Papou
Ah oui quand il s’agit de viking, mon petit coeur supporte très bien, va comprendre 🙂
Bon sang, je ne connais pas cette série, il va falloir que je la découvre.
Ah je te la conseille 🙂 et si tu aimes le haut moyen âge et les vikings, précipite toi 🙂
Je ne connaissais pas le roman, mais j’ai adoré la série, déjà vu les 2 premières saisons et en attente de la 3ème .. .. qui est sûrement déjà sortie en streaming, mais que je voulais voir en français.
La quatrième saison arriiiiive… j’adore cette série 🙂 mais attention ce n’est pas un roman mais une saga noroise du XIIIe, c’est particuliers… mais moi j’aime 🙂