L’avenir

Dans une ville en ruine, où le peu d’habitants qui restent semblent abandonnés à eux-même, Gloria s’est installée – posée plutôt – dans la maison de sa fille, abandonnée depuis sa mort. À la recherche de ses petites filles disparues, elle tente de déchiffrer l’abime qui la séparait de son enfant, perdue de vue depuis longtemps, et de comprendre comment la vie a pu les amener à cette absence qui la ronge. Peu à peu du fond de son isolement, elle se surprend à regarder autour d’elle la ville qui croule, les incendies qui flambent, la peur qui rôde, les friches qui avancent et peut-être – fragile lueur – une entraide qui résiste, une communauté qui peu à peu se reconstruit mais où tant d’enfants sont portés disparus…

L’avenir est un roman étrange et fascinant qui reste longtemps en tête. À la croisée de l’uchronie et du réalisme magique, il transpose Détroit dans une réalité francophone parfaitement crédible (probablement plus que la réalité actuelle que je trouve tout bonnement stupéfiante), y campe des âmes moins perdues qu’il n’y parait dans une ville déliquescente mais résistante où  les maisons repoussent sur leurs propres cendres, où les parcs redeviennent forêt, où les arbres et les animaux chuchotent à l’oreille des enfants, où les rivières rongent les chairs ou peut-être les soignent, où les plantes renaissent, où toute une nature meurtrie, dangereuse mais aussi nourricière s’épanouit porteuse de promesses de vie et peut-être d’une nouvelle alliance avec l’humain…

J’ai déjà parlé de Catherine Leroux et des ses merveilleux romans, la Marche en forêt, Le Mur mitoyen et Madame Victoria et (devrais-je le répéter ? oui, trois fois oui) je suis encore et toujours en admiration devant son écriture suprêmement évocatrice et absolument limpide. Elle y ajoute ici une recherche tout à fait singulière et réjouissante dans les langues parlées par ses personnages. Non seulement dans le lexique mais aussi dans l’usage de la grammaire – l’utilisation des temps par les enfants par exemple transcrit de façon étonnante leur absence de tout repère. Si la seconde partie, qui décrit justement le monde des enfants, se mérite à mon sens – peut-être parce qu’elle m’a mise mal à l’aise – les deux autres – la première qui brosse le cadre tranquillement apocalyptique et la troisième qui tisse des liens et laisse entrer la lumière, se dégustent littéralement ; interrogeant notre lecture du monde, nos peurs, nos certitudes et d’une façon singulière nos responsabilité et nos devoirs à l’égard des générations à venir. Lumineux !

L’avenir – Catherine Leroux – 2020 – Alto

L’avis de Karine

Un très bel article où Catherine Leroux explique ses recherches et ses choix pour créer les langages oraux de son roman  Forger la langue de Fort Détroit

Le merveilleux film de Florent Tillon sur Détroit qui a inspiré Catherine Leroux et que je vous recommande Détroit Ville sauvage

Lu dans le cadre du trépidant Québec en novembre organisé et animé par la très magnifique et ultimement trépidante Karine et moi-même, catégorie On jase de toi – livre paru en 2020

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6 réponses à L’avenir

  1. eimelle dit :

    cela a l’air d’être un univers particulier! A découvrir!

  2. Aifelle dit :

    Il me tente beaucoup, je vais finir par craquer.

  3. Anne dit :

    Je le veux, j’adore cette auteure !!

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