
Jeanne est une femme d’habitudes et de routines, employée des postes, mariée à un homme aussi prévisible que prévenant, deux filles déjà adultes, un jardin fleuri donnant sur des voies ferrées où elle aime à regarder passer les trains – toujours les mêmes, le 18h01 et son passager si élégant, et le suivant 20 minutes plus tard et sa passagère au chapeau bleu. Mais derrière cette apparence des plus ordinaires se cache une âme lumineuse attachée aux petits bonheurs du quotidien. Et quand un cadre un peu oublié à force d’habitude se détache du mur, un rien d’imprévu se glisse dans la vie bien réglée de Jeanne.
Une de mes filles me dit parfois – entre reproche et amusement – que j’aime les films où il ne se passe rien (surtout quand ils sont en VO et de préférence dans une langue incompréhensible ajoute-t-elle – fi, faites donc des enfants). C’est un tantinet injuste je trouve (quoique pas totalement faux peut-être), disons que comme Jeanne je vois de la beauté – ou du moins de l’intérêt – là où d’autres ne voient que routine et insignifiance… une fleur bizarre, une couleur détonante, un inconnu qui passe, un palindrome inattendu, un petit défi qu’on se donne comme de marcher sur un pavage sans en toucher les joints quand on est enfant. La Beauté des jours est sans doute un roman où il ne se passe pas grand chose mais il réussit le tour de force d’être à la fois un hymne au vrai bonheur – celui qui passe inaperçu tant qu’il est là – et une ode à l’art le plus extrême comme dérivatif à l’ennui qui guette et pourrait menacer le-dit bonheur. J’aime Claudie Gallay, ses personnages, son écriture limpide, sa vision de l’art – ici celui, quelque peu dérangeant à mon sens, de Marina Abramovic, la délicatesse de ses non-dits, la profondeur qui se cache derrière son apparente simplicité. Chacun de ses romans est un petit bonheur de lecture et celui-ci tout comme les autres – plus, peut-être. Solaire !
La beauté des jours – Claudie Gallay – Actes sud – 2017
PS : De la même auteure sur ce blog, Une part de ciel, Les années cerise et je n’ai pas chroniqué les déferlantes, c’est mal !

Hier le nez dans mon cellulaire-portable (ceci est un article bilingue), je tombe derechef sur l’article célébrant les dix ans du blog de ma très aimée et très voyageuse Karine – joyeux blogoversaire twinette – quand tout à coup l’évidence de frappe (tel un sabre laser entre les mains d’un bébé jedi), l’anniversaire de mon blog tombant un jour avant le sien, je l’ai raté. Bon deux jours sur onze (11) (non ? si si !) ans, c’est cosmiquement imperceptible et nous ne nous en soucieront pas au moment de sabrer le champagne avec panache et un katana (soyons fous).
Oyez oyez gens de l’internet livresque international (pas moins), il nous arrive la nouvelle ébouriffante quoique attendue de l’automne, Québec en novembre sera ! Comme tous les ans depuis, je ne sais pas trop, six ans je crois,
PS : Les logos des années précédentes sont tous très beaux (oui je ne suis pas objective mea culpa) et réutilisables par tous et à l’envi mais j’ai quand même commandé un nouveau logo pour cette année, il arrive, il est presque là…
Il y a quelques temps, je suis tombé sur un billet de la très aimée et très fantabuleuse Cuné qui recensait ses meilleures lecture des six premiers mois de l’année et cela m’a semblé du plus grand intérêt. Déjà parce que je n’avais lu qu’un titre sur les huit qu’elle proposait – et ce fut un coup de coeur – ce qui m’en laissait sept à noter toute affaire cessante, ensuite parce qu’elle y mentionnait l’attrait qu’il y avait a trier et faire des choix dans ses lectures récentes avec juste assez de recul pour que les choses soient encore fraîches mais pas trop si je puis ainsi m’exprimer. Je me suis donc inspirée – en toute impunité, j’ai trié et voici ma liste.
et hors tri, hors concours, hors tout, deux romans que je me réservais de lire depuis des lustres en repoussant toujours le moment – du fait de leur statut de classique sans doute – et qui furent comme de bien entendu deux coups de coeur toute catégorie
Je pensais qu’il serait terrible de se limiter mais en fait pas tant que cela (bon un peu quand même), certains livres s’imposent et disposent. En parcourant ma liste (70 livres depuis le début de l’année, je crois que je devrais plier plus d’origamis moi) (Oui je fais des listes sinon je ne sais jamais quoi répondre quand on me demande ce que j’ai lu récemment) Les vies de papier s’est imposé tout naturellement ; ma première lecture de l’année, à la fois grandiose et inquiétante, trouverais-je dans la suite de 2017 quelque chose d’aussi entêtant que cette sublime ode à la vie et à la littérature (heureusement ce fut finalement un bon présage). Les cosmonautes ensuite, pour ce ton à la fois totalement décalé et d’une incroyable fraicheur qui nous garde le sourire même quand on pourrait (oh oui on pourrait bien) le perdre, Bondrée pour sa langue si particulière, toujours à la limite entre oralité et écriture, entre français et anglais, entre poésie et polar, les Passagers du Roissy express pour son incroyable humanité et parce que j’aime François Maspero d’amour, La Daronne parce que c’est la dernière claque que j’ai prise et la joue m’en cuit encore entre rire et grincement de dents (mais comment peut-on écrire la désespérance du monde avec autant de verve et d’optimisme), et enfin Apaise le temps, je ne sais pas trop pourquoi, peut-être parce qu’en le refermant je me suis promis de lire tout – absolument tout – Michel Quint et ça c’est un signe.
Londres 1889, depuis six mois, on entend plus parler de l’éventreur ; Whitechapel souffle enfin. Mais quand une prostitué est retrouvée assassinée dans une ruelle du quartier, toutes les angoisses se cristallisent tant pour la population que pour les policiers de l’East End. Est-il revenu ? Est-ce un imitateur ? Un autre monstre est-il lâché dans les rue ? Voire est-ce enfin l’occasion de l’arrêter ? Pour l’inspecteur Edmund Reid, il s’agit surtout de ne pas se laisser détourner de son enquête par le fantasme de l’éventreur et il entend bien découvrir la raison et le coupable de ce meurtre…


Le soir du jour de l’an, quatre personnes se retrouvent par hasard, en même temps sur le toit de la “Tour du saut”, tristement célèbre pour ses suicides. Les fêtes de fin d’année sont toujours difficiles à passer pour ceux qui se débattent dans de solitaires problèmes. Seulement entre plonger dans la nuit solitaire et discuter avec d’autres de qui va passer d’abord, il y a un pas… qui se révèle ce soir là infranchissable. Alors redescendre oui, mais pour quoi faire ? Recommencer plus tard ? Se résigner à vivre ? Autre chose ? et avec qui en parler sinon avec ceux qui viennent de vivre la même expérience. Seulement, on ne saurait guère trouver personnes plus dissemblables que Martin, Jess, Maureen et JJ et les discussions s’avèrent dès le départ hautes en couleur.
Au XVIIIe siècle, la très mondaine lady Dona St Columb fuit soudain une vie en apparence agitée mais dont la vacuité la mine pour se réfugier avec ses deux enfants en Cornouailles dans une propriété de famille du bord de mer où elle espère se retrouver elle-même. Elle trouve la maison presque à l’abandon, régie par un domestique unique qui semble avoir pris de singulières initiatives. Alors que dans la région des rumeurs courent sur les exactions de pirates français, Dona relève d’étranges indices autour de la maison…
L’immortel c’est Kochtcheï, le tsar de la vie. Démon primordial, inaccessible à la mort mais ni à la souffrance ni à l’abandon que tout amour engendre. Surtout pour un être qui siècle après siècle s’éprend d’innombrables Ielena qui lui sont ravies par autant d’Ivan lourdauds mais humains, ce qu’il ne saurait être. Mais cette fois, c’est de Maria Morevna qu’il s’agit. Cadette de trois sœurs ravies par des oiseaux, voyante et guerrière dans l’âme au destin de velours et de sang, fille de douze mères et protégée de Baba Yaga elle-même alors qu’alentours les mondes tant réel que magique s’embrasent de révolutions et de guerres, se télescopant, se mêlant sans que l’immortel lui-même ne puisse rien y faire à moins bien sûr qu’il ne sache déjà tout de l’avenir…
